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À Marseille, le pop-up de Shein choque les acteurs de la mode

Par Julia Garel

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Retail
Pop-up Shein à Marseille, octobre 2024. Credits: Shein

Shein, marque d’ultra-fast-fashion, a ouvert mardi un pop-up store à Marseille. Ce « véritable temple du shopping », comme elle le qualifie, n’a pas manqué de faire réagir les professionnels de la mode, alors qu’une proposition de loi contre la Fast Fashion suit actuellement son cours au sein des institutions parlementaires.

Du 29 octobre au 3 novembre, les produits de l'enseigne Shein sont disponibles dans une boutique éphémère au 2 rue Henri Barbusse, à Marseille. Une ville que la marque dit ne pas avoir choisie par hasard. Elle explique dans un communiqué : « à l'image des styles mis à l'honneur dans ce Pop-Up Store, la cité phocéenne est un bouillon de contrastes - voire même de contradictions - qui en font un lieu unique en son genre (...) L'esprit marseillais y est célébré de partout, des visuels reprenant des quartiers clés de la ville jusqu'à l'ambiance très méditerranéenne, illustrée par un choix de teintes et de motifs rappelant l'atmosphère très colorée de la ville. »

Selon les propos de Marion Bouchet, directrice Communication de Shein, recueillis par France 3 Provence-Alpes-Côte d’Azur, les magasins éphémères de Shein accueillent généralement entre 2 000 et 3 000 personnes par jour, mais il s'agit toutefois de pop-up stores de taille plus restreinte. Le nombre de visiteurs du pop-up marseillais pourrait donc dépasser ces chiffres.

Le pop-up Shein à Marseille, octobre 2024. Credits: Shein.

Le syndicat régional Mode in Sud a fait part lundi, dans un communiqué, de sa colère. Selon lui, le pop-up de Shein permettra à « l’enseigne aux pratiques douteuses » de faire la promotion de ses produits.

Que reproche-t-on à Shein ?

Les faits reprochés à la marque de mode à bas prix sont multiples : production massive de vêtements, conditions de travail précaires, concurrence déloyale à l’égard des marques françaises, mensonges sur les promotions… Selon Jocelyn Meire, président de Mode in Sud, « les moyens colossaux dont disposent Shein et les autres entreprises de l’ultra-fast-fashion nécessitent la mobilisation de toutes et de tous afin de préserver notre environnement, nos emplois, ainsi que la position de la France dans cette industrie. La relocalisation de la mode en France, qui participe à la ré-industrialisation de notre pays, ne se fera pas sans des prises de décisions claires et fermes. »

Au-delà de l’impact environnemental de Shein, c’est des conséquences de son succès colossal sur le marché français dont les professionnels s’inquiètent. Selon la page web de la pétition « Stop Shein » lancée en juin 2023, l’enseigne propose jusqu’à 8 000 nouvelles références par jour. Ses capacités logistiques et ses stratégies de marketing digital sont très performantes, et son succès auprès des consommateurs n’est plus à démontrer. D’après le reportage de France 3 Provence-Alpes-Côte d’Azur, des dizaines de personnes étaient présentes dès l’ouverture du nouveau pop-up marseillais.

Shein a-t-elle vraiment un impact négatif sur le marché français de la mode ?

Selon les données de Statista, Shein est en tête des ventes de mode en ligne en France (en 2022). Ce qui place la plateforme de mode en concurrence directe avec d’autres e-shop comme Veepee, Zalando et Showroomprivé. Néanmoins, à la différence de ces derniers, Shein vend essentiellement des articles qu’elle a elle-même produit et en tire l’un de ses principaux avantages, à savoir le contrôle des coûts de production.

Le 9 avril dernier, le sénateur Jean-François Longeot expliquait dans un compte rendu de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable que l’impact de Shein sur le marché français de la mode réside dans le fait que ses prix cassés encouragent la production dans des pays à bas coût et « au détriment des exigences sociales, sanitaires et environnementales élémentaires du tissu économique national et européen. »

Une loi contre la fast fashion

Pour rappel : le 14 mars 2024, l'Assemblée nationale a adopté en première lecture la proposition de loi visant à réduire l’impact environnemental de l’industrie textile ; le Sénat examine actuellement le texte. Celui-ci prévoit plusieurs mesures pour réduire la pollution engendrée par la « fast fashion » : définition de la « fast fashion », sensibilisation des consommateurs, création d’un malus écologique et interdiction de la publicité.

Ce texte s'inscrit dans la continuité de plusieurs travaux conduits ces dernières années, notamment dans le cadre de l'examen de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (AGEC) en 2020, de la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (« Climat et résilience ») en 2021, ainsi que de la loi visant à renforcer la régulation environnementale du numérique en 2021.

La France n’est pas le seul pays européen à s’insurger contre la plateforme Shein. Selon l’AFP, l'Allemagne, l’Autriche, le Danemark, les Pays-Bas et la Pologne ont demandé à Bruxelles de serrer la vis contre les sites de commerce en ligne Temu et Shein en septembre 2024.

Pour contrer les attaques, Shein a multiplié les actions : créations d'un fonds de circularité de 200 millions d’euros, recrutement de Günther Oettinger, figure influente de la politique européenne et lancement d'un programme de 10 millions d'euros pour les designers européens. Actuellement, l'entreprise se prépare pour son introduction en bourse à Londres, mais fait face à une surveillance politique accrue, notamment concernant les allégations de travail forcé dans la région du Xinjiang en Chine.

Shein