Des vêtements plein son sous-sol, Pierre Talamon rouvre "la boule au ventre"
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Paris - Créateur de vêtements pour homme et membre du bureau de la Fédération nationale de l’habillement (FNH), Pierre Talamon s’apprête à rouvrir sa boutique dans le Marais parisien avec “la boule au ventre” en raison des importantes stocks qui n’ont pu être écoulés jusque là.
Quel sentiment prédomine à l’approche de la réouverture ?
“On a cette date du 19 mai qui nous offre un peu plus de visibilité. Maintenant, vous dire qu’on ouvre joyeusement et sans avoir la boule au ventre, ce serait mentir. Sur 15 mois de crise sanitaire, j’ai perdu 40 pour cent de mon chiffre d’affaires, et les aides n’ont pas été à la hauteur.”
“On ne s’habille pas pour défiler tout seul devant sa glace le soir, mais pour participer à des représentations sociales, rencontrer des gens… Nous sommes toujours en télétravail, cela pèse très lourdement sur le résultat des boutiques de mode.”
“Nos amis restaurateurs ont été très bien défendus, mais pour nous il reste encore une sacrée marge, notamment en matière de stocks et de baisse de chiffre d’affaires. C’est un peu malheureux parce que, à l’instar de la gastronomie, la mode fait partie de l’identité nationale en France. Et c’est un acteur économique important.”
Les aides annoncées par le gouvernement ne suffisent pas ?
“Il aura fallu attendre le mois d’avril 2021, le 15e de crise sanitaire, pour avoir une option (d’aide qui compense) 20 pour cent du chiffre d’affaires. C’est grâce à cette option qu’on peut prendre en compte la taille d’une entreprise. Pour les commerces qui ont deux ou trois boutiques, 1 500 euros, voire 10 000 euros d’aides à partager sur deux ou trois points de vente, ça devient très difficile. (…) Il faudrait que le gouvernement se rattrape sur juin, juillet et août, avec un vrai accompagnement à la reprise et des aides qui soient dégressives en fonction du chiffre d’affaires.”
Concernant les surstocks, n’est-il pas possible de les solder ou de les vendre sur internet ?
“Il y a une saisonnalité en mode, on ne vend pas des clous ou des médicaments. On reste sur trois saisons touchées, été 2020, hiver 20/21 et été 2021. Les stocks, ça a l’air abstrait, mais ce sont aussi des factures de fournisseurs, et pour qu’une boutique puisse marcher, c’est en moyenne minimum 100 000 euros d’achat pour une saison. Un vêtement, ça a un prix, il y a le coût de fabrication, le coût de la matière, le temps passé parce que la création nous prend beaucoup de temps.”
“Ici, la vente internet représente à peu près 8 pour cent de notre chiffre d’affaires. Il y a eu un engouement au début de la crise sanitaire pour l’achat sur internet et dans une moindre mesure pour le click&collect, mais ça a baissé une fois qu’il n’y a plus eu l’effet de surprise. Un vêtement, c’est aussi une couleur, une matière, ça se regarde à la lumière, sous différentes lumières d’ailleurs, et puis ça se touche… Ça reste limité, la vente sur internet.” (AFP)