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Comment le secteur mode réagit face à l'élection de Donald Trump ?

Par Florence Julienne

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Donald Trump, West Palm Beach Convention Center, Floride, 6 novembre 2024 Credits: Jim Watson / AFP

L’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis, mercredi 6 novembre 2024, secoue le monde politico-médiatique. Quid du secteur mode ? FashionUnited est parti à la pêche des rares personnes qui s’expriment alors que l’enjeu est de taille.

Si les artistes, musiciens et acteurs, se sont fortement mobilisés en faveur du parti démocrate représenté par Kamala Harris, les marques et les personnalités de la mode n’ont pas vraiment manifesté leur intérêt pour ces élections. Du moins publiquement., Et pourtant, tant sur le plan humain qu’économique, Donald Trump ne peut laisser la mode indifférente.

Donald Trump ou l’incarnation d'un guerrier américain qui n'a pas froid aux yeux

Humainement, le nouveau président des États-Unis (qui sera investi le 20 janvier 2025) est à cent mille lieues des valeurs défendues par la mode, à commencer par le droit des femmes. En nommant trois juges conservateurs à la Cour suprême durant son premier mandat, il a permis l'annulation, en juin 2022, de la garantie fédérale du droit à l'avortement. Par ailleurs, sa politique migratoire, le « plus grand programme de déportation de migrants de l'histoire américaine », n'est pas compatible avec l'inclusion des communautés, en vogue dans l’industrie de la mode.

Son mindset (état d’esprit) est vomi par beaucoup, à commencer par Diane Pernet, une Américaine figure de la mode internationale, qui réagit au micro de FashionUnited : « J’ai l’impression d’avoir reçu un coup dans l’estomac. Je n’arrive pas à croire que plus de la moitié des Américains ait voté pour ce criminel, qui détestent les femmes, qui dit que les latinos sont des poubelles, etc. J’ai honte pour mon pays et je suis dévastée. Comment les Américains peuvent-ils être assez stupides pour croire qu’il va les aider ? ».

« Cette élection est une grande déception et soulève beaucoup d’inquiétudes. Half est une marque engagée dans la lutte pour la liberté féminine, contre les violences qui leur sont faites et pour une mode durable. Nous restons déterminées, et encore plus dans ce contexte, à défendre ces valeurs, ajoute Carole Swartvagher, fondatrice d’HALF, une marque française, locale, responsable et solidaire.

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Si peu de marques se sont exprimées sur le sujet, c’est peut-être que les réalités économiques sont telles que personne ne veut risquer de se fâcher. Et pourtant, l’incitation au « America first » ne va pas faciliter les exportations de produits sur le sol américain. Le républicain prévoit d'imposer des droits de douane universels de 10 à 20 % sur toutes les importations américaines, tandis que les produits fabriqués en Chine pourraient être frappés d'un droit de douane de 60 %.

Selon BFM, les États-Unis sont le premier marché à l’export des parfums et cosmétiques (2,5 milliards d’euros, soit un produit sur cinq). Autant dire que les groupes de luxe français, qui vendent des parfums, doivent être dans leurs petits souliers et ne souhaitent pas prendre la parole. En 2023, les USA arrivaient en quatrième position (derrière l’Italie, l’Allemagne et l’Espagne) des exportations de vêtements, maille et chaîne&trame, de marques françaises (source Observatoire économique IFM).

Pire : selon une étude réalisée par la National Retail Fédération et préparée par Trade Partnership Worldwide, les droits de douane proposés pourraient encore réduire le pouvoir d'achat des consommateurs américains de 46 milliards de dollars à 78 milliards de dollars chaque année après leur mise en œuvre.

L'organisation a déclaré que les droits de douane « auraient un impact négatif sur les coûts d'une large gamme de produits de consommation vendus aux États-Unis » et pourraient être « trop importants pour que les détaillants américains puissent les absorber ». Ce qui se traduirait par des prix plus élevés pour les consommateurs. Les coûts pour les consommateurs pourraient augmenter d'environ 10,7 milliards de dollars pour les chaussures et de 24 milliards de dollars pour les vêtements, ce qui pourrait entraîner une réduction des dépenses de 22 à 33 % (source fashionunited.com).

« L’élection de Trump exacerbe les fractures sociales en mettant en lumière des divisions profondes autour de sujets tels que l’immigration, la justice sociale et le rôle de l’État. En tant que designer, mon rôle est de créer des vêtements uniques et interactifs qui transcendent ces différences » commente Jean Schramme, créateur de la marque Bad Jeans ».

« Quand l’Amérique éternue, l’Europe prend froid », Carla Bruni

Une des rares célébrités mode à avoir posté son opinion (à l’heure où cet article est publié) est Carla Bruni. Sur son profil Instagram, elle apparaît presque nue, revêtue d’un immense drapeau américain. Le post mentionne la citation suivante : « Quand l’Amérique éternue, l’Europe prend froid ». L’expression renvoie à une conjoncture dans laquelle les relations transatlantiques sont l'épicentre de l'économie mondiale. Mais pas que…

L'une des positions les plus poignantes et les plus controversées de Donald Trump concerne son point de vue sur le développement durable. Elle a été résumée dans un discours prononcé à New York, en septembre 2024 : « Pour vaincre davantage l'inflation, mon plan mettra fin au Green New Deal que j'appelle la nouvelle arnaque verte. La plus grande escroquerie de l'histoire, probablement ». Pour mémo, le Green New Deal est le nom donné à plusieurs projets globaux d'investissement, notamment dans les énergies décarbonées, visant à répondre aux grands enjeux environnementaux et climatiques, tout en promouvant la justice sociale.

Cette posture de Donald Trump fait réagir Catherine Dauriac, présidente de l’association Fashion Revolution et militante de la première heure contre les climato-sceptiques : « Trump représente un danger pour l’avenir, le climat, les libertés individuelles, la paix dans le monde. Un déni total des problématiques environnementales (reprise des extractions de gaz de schiste par exemple), une surexploitation et une politique antimigratoire qui bafoue les droits humains. »

Par ailleurs, en affichant un soutien inconditionnel au président israélien Benjamin Netanyahu et en se défendant de vouloir s’impliquer dans la guerre en Ukraine (il règlerait le problème en deux jours), Donald Trump oblige les Européens à ne compter que sur eux-mêmes sur ces conflits armés.

Bref, l’important pour les électeurs américains, ce ne sont ni la protection des droits humains, ni l’écologie et encore moins la création. Le rêve américain, c’est le réenchantement et, à ce jeu, c’est l’économie qui prime. Ajoutons à cela, la perte de poids des médias qui n’ont pas vu venir l’élection contrairement aux réseaux sociaux, à commencer par X, qui regorge aujourd’hui de « hourra » de victoire. « Vous êtes les médias » a déclaré Elon Musk, premier soutien médiatique de Donal Trump.

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