Julien Fournié : ce qu’il faut d’humilité pour s’affranchir des codes de la Haute Couture
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D’humilité et d’humour. Le final du défilé de Haute Couture, « First Circus », proposé par Julien Fournié pour le printemps-été 2025, restera un moment unique en son genre dans la semaine de la Haute Couture janvier 2025.
Sur l’air de « Crucified » (Army of Lovers, un groupe suédois des années 90 connu pour ses extravagances), Julien Fournié est arrivé sur le podium du Théâtre Mogador en dansant, entouré d’une troupe. Puis, assis sur une balançoire, il s’est envolé, flottant au-dessus de ses mannequins, dans un nuage de bulles.
Envolé, c’est bien le terme pour qualifier la désinhibition de ce show, organisé pour fêter les seize ans de sa maison de Haute Couture (il est membre permanent de la FHCM) et son anniversaire (cinquante ans). « C’est un rêve de gosse, indique Julien Fournié à FashionUnited. Jusqu’à l’âge de 18 ans, j’ai été victime de harcèlement scolaire. Ma seule porte de sortie était de me réfugier dans ma chambre, entouré de personnages fictifs qui nourrissaient mon imaginaire. J’ai voulu, à travers ce défilé, leur rendre hommage ».
La collection « First Circus » est donc une ode à l’imagination et à la liberté de créer. « Oui, c’est du spectacle. Non, ce n’est pas de la mode. À bas les tendances ! Vive la Haute Couture indépendante et libre ! » écrit-il dans le communiqué. Une posture d’autant plus facile à adopter qu’il crée en fonction des personnes qu’il habille. Or, c’est précisément cela la Haute Couture et, par extension, cela explique la diversité de sa proposition textile.
Le show First Circus de Julien Fournié est celui de sa «quintessence ». C’est aussi celui de sa libération.
« J’ai été obligé d’investiguer différentes voies pour comprendre ce que je voulais faire » explique-t-il à FashionUnited. Aux côtés de ses muses (Audrey Fleurot, Deborah François, Marina Viotti qui portaient leur propre tenue), il a orchestré un spectacle sur le thème des animaux fantastiques.
À commencer par The White Rabbit, surnom qu’on lui donne dans la mode, car il a toujours peur d’être en retard. Libéré de toutes considérations morales, il en a fait un pourvoyeur de drogues, avec un habit brodé, sur le devant, de bulles en 3D, d’un cake avec écrit « eat me » dans le dos, et de (faux) sang, acides et ecstasys qui coulent sur le revers du col de la veste.
Autre personnage hybride, mélange de zèbres et de flamants roses, cette robe en tulle rebrodée de cristaux, ornée de « coquillets » (ronds que l’on découpe dans le tulle, à l’image d’un escargot).
La Bête, interprétée par le danseur Pierre-Antoine Brunet, est inspirée des X-Men. Il porte un body en tulle illusion (invisible) sur lequel l’atelier a brodé un motif de poils 3D en trompe-l’œil, également réalisé avec des cristaux de verre. Ultime détail : la barbe, nouvel It accessoire selon Julien Fournié, à l’image de celle qui a offert à son apparence celle d’un magicien.
Prochaine étape : le récit de son adolescence et de son arrivée dans le monde de la mode. Quand on sait ce que celui-ci réserve d’illusions perdues, ça promet.