Comité RSE de Shein : Christophe Castaner assume, le secteur mode français s’étrangle
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Rebondissements dans l’affaire qui oppose Christophe Castaner, personnage public, ancien ministre de l’Intérieur, qui a récemment intégré les équipes de la marque chinoise d’ultra fast fashion Shein, et les fédérations des professionnels de la mode, dont la mission est de préserver les intérêts des marques françaises.
Suite à la nomination de Christophe Castaner au poste de conseiller RSE de la marque d’ultra fast fashion Shein, les fédérations mode ont vivement réagi. D’abord Mode in Sud, Union Professionnelle de la Mode et de l’Habillement de la région PACA, puis la Fédération Française du Prêt à Porter Féminin (FFPAPF), comme FashionUnited l’a précédemment relayé.
Mais Christophe Castaner ne s’en excuse pas. Au contraire, il attaque. « Plus qu'une explication ou une justification, c'est un coup de gueule, écrit le média La Tribune, dans lequel il s’est confié en exclusivité. Sa nomination ? La suite logique de son travail de conseil, dit-il, lui qui a retrouvé le monde privé depuis la fin de sa carrière politique (Shein fait partie de la douzaine d'entreprises que l'ancien ministre accompagne dans leur stratégie de développement) ».
Il y dénonce « un mépris selon lequel, parce que l’on vient de la politique et que l’on passe dans le privé, on ne serait pas capable de faire les choses ». Or, selon lui, les pouvoirs publics ne peuvent pas tout et la taxation de la fast fashion serait une erreur, car elle « démocratise la mode » : « Il y a un effet moralisateur dans tout cela qui m’exaspère. Shein a acquis une maturité qui lui permet d’adopter une démarche d’amélioration continue et a une vraie volonté de s’adapter aux attentes du marché européen ».
Est-on en train de vouloir taxer une entreprise qui démocratise la mode ? Autrement dit de s’en prendre aux classes populaires ?
« Non, répond la FFPAPF dans son communiqué. Shein ne "démocratise" pas la mode : elle la détruit et plus fortement en régions. Shein participe à la destruction des emplois et du savoir-faire textile, en particulier dans les territoires ruraux. Nos commerçants se retrouvent en concurrence déloyale face à une entreprise qui contourne les cadres sociaux, environnementaux et fiscaux établis pour protéger un marché équitable. »
Et de questionner Christophe Castaner sur son action alors que des enseignes populaires comme Camaïeu, Kookaï ou Jennyfer traversaient des crises ? Pour Yann Rivoallan, signataire du communiqué et président de la FFPAPF, il s’agit ici d’une hypocrisie qui consiste à s’adjoindre les services d’un proche du président de la République pour s’acheter une « respectabilité ».
Sous prétexte de comité RSE, Shein voudrait faire croire qu’elle peut initier des initiatives vertueuses. À ce stade, les opinions sont tranchées et les propos ne manquent pas de virulence : « Affirmer que taxer la fast fashion reviendrait à rendre la mode inaccessible s’inscrit dans une argumentation trompeuse ».
Et puisqu’il s’agit de défendre le modèle d’une mode accessible, la FFPAPF invite Castaner à se tourner vers les ventes de seconde main des marques françaises, approche plus respectueuse de l’environnement, souvent moins chère et plus durable que les produits Shein.
Cet échange intervient alors qu’un projet de loi sera bientôt en discussion au Sénat. Un projet que Yann Rivoallan résume en ces termes : « un système de bonus/malus en fonction de l’affichage environnemental. Libre à Shein de créer des produits de meilleure qualité ou de le répercuter, ou non, sur ses marges bénéficiaires ».