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Baselworld 2016: chaque horloger fait face différemment à la crise

Par Herve Dewintre

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Contre vents et marées, la foire de Bale bat son plein. Ouvert depuis le 17 mars dernier, le plus grand événement au monde, dédié à l’horlogerie de luxe, a certes permis d’ausculter les prochaines tendances, mais aussi de prendre le pouls d’une industrie du luxe qui s’interroge sur les soubresauts à venir.

Sur place, le constat est implacable : le marché chinois s’essouffle et les exportations horlogères baissent. Pas de quoi cependant émousser l’aplomb d’un secteur qui en a vu d’autres. Apres tout, il ne faut pas oublier que l’horlogerie suisse est née dans la tempête, pendant les guerres de religion : tout d’abord lorsque Jean Calvin, au nom de la morale protestante, interdit aux refugiés Huguenots de porter des objets décoratifs et des bijoux (qualifiés d’objets de séduction superflus), ce qui poussa les orfèvres à s’établir horloger ; puis plus tard, lorsque Louis XIV révoqua l’édit de Nantes, ce qui favorisa l’émigration d’un grand nombre d’artisans vers l’arc Jurassien, au sein d’une contrée où ils trouvèrent un environnement paisible et une main-d'œuvre possédant les vertus propres à l'horlogerie : « minutie, patience, persévérance, cœur à l'ouvrage, droiture et une religion réformée prépondérante, propre à la recherche technique et au commerce ».

Le triomphe de la montre mécanique

Tout ca pour dire que les horlogers suisses en ont vu d’autres. Ils connaissent les crises, ils ont surmonté la Grande Dépression, puis l’avènement de la montre à quartz. Ils sauront bien faire face à la dégringolade du marché de Hong Kong. D’autant plus que le marché chinois a toujours inspiré la prudence à certains dirigeants. Seuls ceux qui ont cédé trop vite aux chants des sirènes se retrouvent aujourd’hui avec un stock énorme et s’en mordent les doigts. Chez Zenith, le directeur général Aldo Magada ne cache pas que le recul du chiffre d'affaires a été dû avant tout aux clients chinois. Hong Kong était le plus gros marché de la manufacture locloise. « La marque avait auparavant un mix produit équilibré entre les montres en or et en acier, mais il est devenu beaucoup plus dur de vendre de l'or en Chine en raison de la loi anti-corruption. En conséquence, le prix moyen a chuté » déclare le dirigeant au magazine suisse Romandie.

Par contre, contrairement à ce que l’on pourrait croire, l'apparition du téléphone portable a permis à la montre (devenue de facto obsoléte comme objet indiquant l’heure) de se réaffirmer comme bijou, comme un objet de prestige, et de ce fait, a participé au grand retour de la montre mécanique. Ce que confirme Rolf Studer, vice-président de Oris : Notre créneau, des montres exclusivement mécaniques, sérieuses et utiles, à prix moyen (autour de 2 200 euros), marche très bien aujourd'hui.» indique t’il au Figaro.

On se concentre sur les icones

D’un point de vue général, l’excellence n’est plus une option mais une condition sine qua non. Les maisons très haut de gamme du swatch group, à savoir les marques Breguet, Blancpain et Jaquet Droz multiplient les clins d’oeils aux amateurs avertis en présentant des complications exceptionnelles. Même son de cloche chez Patek Philippe. La maison familiale affirme vouloir privilégier plus que jamais la qualité à la quantité, malgré la demande. Thierry Stern, président de l’horloger genevois l’affirme d’ailleurs avec force : "Il faut avoir de belles pièces neuves avec des innovations techniques. C’est ce qui permet de passer au travers de ces crises".

Globalement, on n’est pas étonné d’apprendre que, contrairement aux petites marques qui souffrent d’une absence de notoriété, les manufactures d’envergure vendent très bien leurs montres les plus chères (c’est à dire au delà de 350000 euros). Toutes veillent à ne négliger aucun marché. « Les belles montres que nous ne vendront pas en Chine, nous les vendront ailleurs, en Europe ou aux Etats-Unis » disent-ils en cœur. Reste que le tourisme en Europe devrait aussi poser problème dans un futur proche…

On n’est pas non plus bouleversé de constater que les marques phares s’accrochent à leurs icones pour traverser la crise. Le mot tradition est prononcé à chaque stand. L’innovation se fait ailleurs : dans la création de nouvelles certifications (Rolex a par exemple dévoiler sa nouvelle certification dite de «Chronomètre superlatif», plus sévère que les normes horlogères, destinée à tous les modèles).

Vente en ligne et montres connectées

Par contre, on est davantage surpris par le fait que les horlogers, qui ont mis tant de temps à se lancer dans la vente en ligne, ont désormais choisi de se renforcer sur ce canal de distribution. Jean-Claude Biver, le président du pôle montres du groupe de luxe français LVMH, a ainsi annoncé son intention de lancer ses propres vitrines de vente sur internet. Le projet devrait aboutir au plus tard en 2018-2019. Zenith (LVMH) avait d’ailleurs commencé la vente en ligne de ses modèles sur le site MrPorter.com dès le mois d’octobre dernier. C’était la première fois qu’une entreprise de montres suisses haut de gamme franchissait le pas et acceptait de proposer ses produits via un revendeur présent uniquement sur internet.

Enfin, comment ne pas parler des montres connectées. Plus question de se cacher la tête dans le sable. On perçoit clairement la création d’un nouveau marché puisqu’au quatrième trimestre 2015, il s’est vendu plus que smatwatches que de montres suisses. Apple et Samsung détiennent sans surprise les plus grosses parts du marché, mais des ponts s’organisent entre les géants de l’électronique et les grands noms du luxe. Breitling a par exemple lancé la « B55 connected » ; et Tag Heuer la « Connected Watch ». Plus inattendu, l’association entre Samsung et De Grisogono. Une montre pour les femmes, conçue conjointement par le géant coréen et Fawaz Gruosi. Très réussie, cet objet de désir ne fait ni l’impasse sur l’innovation (le système est commandé par une lunette tournante) et encore moins sur l’esthétique avec son bracelet en galuchat et son flot de diamants noirs et blancs.

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