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Les Wertheimer: les "mystérieux" propriétaires de Chanel

Par Anne-Sophie Castro

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Loin de la « folie des grandeurs », les frères Wertheimer, propriétaires de Chanel, sont presque diamétralement opposés au monde des défilés tape à l’œil signés Karl Lagerfeld. Lorsqu’ils assistent au show, probablement le plus sélecte de la planète, ils ne s’assoient pas au front-row mais plutôt loin derrière, à la quatrième ou cinquième rangée, pour passer incognito…

Alain et Gérard Wertheimer arrivent en toute discrétion, sans se faire entendre et quittent le Grand Palais presque à la sauvette, en laissant la place au Kaiser sous les applaudissements et les flashs des paparazzis.

Ces dernières quarante années, les Wertheimer ont accepté très peu d’interviews. Ils ne laissent pas non plus entrevoir leurs demeures où des œuvres de Picasso, Matisse ou Rousseau prônent dans les pièces. Karl Lagerfeld s’amuse à dire « Entre nous, c’est une relation qui ressemble à celle de Faust et le diable » !

Depuis la vente de la marque de cosmétiques Bourjois à Coty l’an dernier, le groupe s’est recentré sur Chanel, Eres et Bell & Ross. C’est Alain qui, à 67 ans, dirige ces trois activités depuis son bureau de New York, un bel édifice avec vue sur Central Park.

Son frère cadet d’un an, Gérard, réside à Genève et dirige la division des montres et des bijoux du groupe. Ensemble, ils se répartissent le capital de Chanel, géré en société familiale représentant un des plus grosses fortunes au monde. L’entreprise ne cotise pas en bourse et ne rend pas publique ses données financières. D’après les estimations du magazine Challenges, la fortune de Chanel se situe aux alentours de 16.500 millions d’euros, considérée comme la sixième fortune de France. L’agence Bloomberg, elle, a calculé la valeur de l’entreprise à près de 14.000 millions d’euros.

Le parfum Chanel nº5, déclencheur de prospérité

L’empire a été créé dans les années 1920 par Pierre Wertheimer, leur grand-père et fils du propriétaire d’un ranch alsacien d’origine juive, parti à Paris à la recherche d’un futur meilleur. En plus de l’héritage de la marque Bourjois, Pierre a eu la chance de s’allier au bon moment avec Coco Chanel et le propriétaire des Galeries Lafayette, Théophile Bador, afin de produire et de commercialiser le parfum portant le chiffre porte-bonheur de la couturière, le numéro 5. En 1924, la société Parfums Chanel voyait le jour. Wertheimer disposait alors de 70 pour cent des parts, Bador 20 pour cent et Coco 10 pour cent. Dépassée par les évènements et le succès de la fragrance et émotionnellement fragilisée par sa rupture avec un noble russe, Coco Chanel acceptait un compromis qu’elle ne tardera pas à se repentir.

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“Un vrai billet de loterie gagnant”, reconnaît un membre de la famille Wertheimer, Coco n’a pas réussi à renégocier le contrat. D’après des témoins de l’époque, la couturière « s’est sentie trahie et a commencé à entrer dans une phase antisémite… ». Elle aurait profité de l’occupation nazie lorsqu’elle et Pierre –comme d’autres juifs qui ont fui les Etats-Unis- se trouvaient en bandes contraires, pour tenter de récupérer ses actions. Proche du régime de Vichy –ayant maintenu une idylle avec un agent du Reich, Hans Günter von Dincklage, alias Spatz, la couturière est arrivé à dénoncer son ancien associé. Mais celui-ci est parvenu à éviter l’expropriation grâce à l’aide d’un ami de l’industrie aéronautique qui fabriquait des avions pour les nazis. Puis, ironie du sort, après la Seconde Guerre Mondiale et après 30 ans de litiges, c’est Pierre qui a récupéré Chanel, sur le point de tomber dans l’oubli et dans la ruine. En 1954, il prenait les rennes de la Maison et finançait, en échange, le train de vie de Mademoiselle Coco comprenant une suite au Ritz, une Cadillac avec chauffeur ou encore un cuisinier attitré, histoire de rendre la vie plus belle à Coco et faire reluire l’image de son entreprise.

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Après le décès de Pierre en 1965, Jacques son fils unique prenait la relève. On évoquait « un homme hypocondriaque qui ne se souciait guère de l’entreprise et préférait se dédier à collectionner les œuvres d’art ». Dix ans plus tard, son fils Alain âgé de 26 ans prenait la tête de ce qui allait devenir l’empire Chanel. Lui et son frère Gérard ont hérité de la passion pour le gain de leur grand-père. Ensemble, ils choisirent de s’associer avec Karl Lagerfeld pour lui confier le design des collections. Hormis Chanel, les frères Wertheimer sont propriétaires des vignobles Rauzan-Ségla et Château Canon dans la prestigieuse dénomination d’origine de Saint-Emilion, et possèdent de nombreux chevaux pur-sang aux Etats-Unis et en Europe. Une passion pour laquelle on comprendra pourquoi ils préfèrent fréquenter les hippodromes plutôt que les capitales de la mode.

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