Justin O’Shea viré de Brioni au bout de 8 mois
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Un petit tour et puis s’en va. On ne peut pas dire que Kering aura laissé à Justin O Shea le temps de prendre ses aises. Huit mois après son arrivée chez Brioni, le charismatique directeur artistique a été prié de faire ses valises. Les résultats ne seraient pas à la hauteur du groupe de luxe. Ce départ, en plus d’être fulgurant, confirme à ceux qui en doutaient encore que les directeurs artistiques sont désormais des variables d’ajustements comme les autres au sein des maisons de luxe.
Le mariage était pourtant prometteur. Depuis quelques années, Justin O’Shea impose sa vision du style au monde de la mode avec une autorité suprême. Acheteur star de Mytheresa.com, ce bel australien au bronzage impeccable a su hisser, grâce à son flair et bagout, cet obscur site commercial munichois au premier rang des destinations digitales qui comptent. Son physique de baroudeur viril mais tiré à quatre épingles lui a parallèlement permis de devenir une figure médiatique de premier plan. Excellent commercial, acheteur doué, star d’instagram, figure des front row, c’était l’homme orchestre parfait pour donner un soupçon de modernité à une belle endormie. En théorie.
Sa mission chez Brioni était simple, et paraissait largement dans ses cordes. Il s’agissait de réveiller la griffe italienne fondée en 1945 à Rome par le tailleur Nazareno Fonticoli et l'entrepreneur Gaetano Savini. Une marque fidèle à son adn depuis six décennies : les costumes de luxe fait main. L’univers sérieux de la confection italienne pour homme. Kering a fait l'acquisition de l'entreprise en 2012. La marque traversait une passe difficile. Le chic à la James Bond ne faisait plus recette. La marque, très présente en Europe de l’Ouest, avait largement subi la récession en Russie. On peut imaginer que dans l’esprit des nouveaux propriétaires, O’Shea aurait à reproduire ce qu’Hedi Slimane fit pour Dior Homme il y a quelques années.
Oui le bel australien a réveillé la marque. Il l’a fait en la secouant au son du heavy metal, sollicitant les membres du groupe Mettalica pour être les nouveaux visages de la marque. Nouveau logo, nouvelle boutique. La planète mode a adoré cette imagerie radicale (surtout les rédactrices d’ailleurs), les clients historiques de la marque beaucoup moins visiblement.
« Le plan de revitalisation va continuer »
Il faut surement du temps pour fédérer une nouvelle clientèle. Ce temps, Justin O’Shea ne l’aura pas. Il n’aura pas réproduit l’équation Slimane. Il faut dire à sa décharge que Dior est une marque de mode, alors que Brioni est une marque de confection de luxe destinée à des hommes férus d’élégance classique. Bref, la greffe n’a pas pris, du point de vue de Kering qui est déçu des premiers résultats (les clients fashion ne se sont pas précipités outre mesure, la clientèle historique s’est enfuie épouvantée).
Dans une déclaration à la presse, le PDG de la maison *Gianluca Flore* veut faire bonne figure :* "La stratégie de revitalisation de Brioni qui a commencé au début de cette année va continuer, grâce à un plan à long terme qui vise à établir la marque comme l'un des leaders du prêt-à-porter de luxe masculin."* Virer un directeur artistique au bout de huis mois peut sembler incompatible avec le fait de proposer à son entreprise une vision à long terme mais il est vrai que la chute des flux touristiques qui touche l’Europe à cause des attentats n’est pas le terrain idéal pour entamer une réflexion apaisée. En début d'année, le groupe avait annoncé un plan de restructuration (139 suppressions d’emplois) en raison d'une "situation de surproduction". Brioni employait auparavant 1150 personnes sur ses trois sites en Italie.
Credit photo: courtesy of Brioni