Janie Samet s’est éteinte à 91 ans
loading...
La grande journaliste de mode Janie Samet nous a quittés ce dimanche 4 décembre. Son immense carrière au Figaro avait été couronnée par un oscar de la mode. Le seul jamais décerné.
Janie Samet a tout vu, tout connu. Sa plume, respectée des grands patrons, admirée des amateurs et crainte des couturiers faisait la pluie et le beau temps dans le monde de la mode où ses jugements faisaient figure d’oracle. Aucun créateur n’aurait osé débuter son défilé sans sa présence. Un rapide – et quasi impossible – survol des temps forts de sa carrière donne une toute petite idée de son envergure. Jugez plutôt : à 18 ans, alors stagiaire à l’Echo d’Oran, elle rencontre le co-lauréat du concours organisé par le Secrétariat international de la laine. Ce laureat a 17 ans et une grande carrière l’attend lui aussi. Nous sommes en 1954. Le jeune homme s’appelle Yves Saint Laurent. C’est sa première interview. Une longue complicité s’établira au fil des décennies entre le couturier et la critique.
Ce premier fait d’arme sera suivi de nombreux autres. Dès 1957, la journaliste rejoint l’aurore où elle crée « Bons Baisers de Londres de Janie Samet ». L’acuité de son regard posé sur le swinging London lui vaut l’intérêt d’un grand quotidien : le Figaro, que la plume intègre en 1979, à la rubrique mode pour ne plus la quitter jusqu’en 2004. C’est le début d’une longue carrière au quotidien éblouissant, déjeunant un jour avec Pierre Balmain chez Maxim’s, dinant le lendemain à l’Élysée avec la reine d’Angleterre, soupant chez le duc de Northumberland avec le prince Charles, prenant le thé avec la princesse de Galles, passant une semaine complète, chez les Windsor, séjournant à Miami avec Gianni Versace, découvrant le Tanger intime de Jean-Louis Scherrer ou la Provence secrète de Pierre Bergé, passant ses vacances à Théoul avec Louis Féraud.
Plume acérée et coup de griffes
Son œil acéré s’accompagnait parfois de légers coups de griffes, comme ceux donnés à Karl Lagerfeld (la seule qui s’y soit aventurée – écrivant avec clarté dans ses mémoires : « les couturiers n’aiment pas les femmes » ou éreintant le défilé Chanel MCMG - Mauvais chic, Mauvais Genre), osait la circonspection devant les audaces de John Galliano, récemment nommé par le jeune capitaine d’industrie Bernard Arnault, chez Dior. Son inépuisable curiosité lui faisait naturellement mettre en lumière les jeunes créateurs qui -de Jean Paul Gaultier à Thierry Mugler en passant par Christian Lacroix débutant chez Patou – ont pu bénéficier de son enthousiasme et de son soutien. Après avoir quitté son poste, le journaliste ne cesse pas pour autant d’écrire. Publié en 2006, son livre Chère Haute Couture donne de précieux enseignements aux jeunes journalistes tout en délivrant, aux historiens et aux amateurs de monde, des pans précieux de la face cachée des grands.
Crédit photo : Janie Samet, Chère Haute Couture, éditions Plon