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Le lin a l’avenir (et le monde) devant lui

Par Odile Mopin

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La plante à la fleur bleue est européenne. Cultivée à 80 pour cent sur une bande côtière allant des Hauts de France à la Belgique et aux Pays-Bas. Un quasi-monopole mondial pour la culture d’une filière qui dispose d’un très fort potentiel dans la mode (et également pour les usages techniques). C’est ce que confirme pour la première fois une étude sourcée, chiffrée, réalisée par la Confédération Européenne du Lin et du Chanvre (CELC), avec le concours de l’Observatoire de l’Institut Français de la Mode (IFM).

Ce baromètre, présenté ce 29 juin, mesure l’attractivité de la fibre aux atouts « verts » et les intentions d’achats du grand public dans les prochains mois. Il a été réalisé auprès de 6 600 consommateurs répartis dans six pays : la France, l’Italie, le Royaume-Uni, les Etats-Unis, mais aussi la Chine et l’Inde. Décryptage d’une étude inédite qui révèle les perspectives de développement du lin européen à l’échelle mondiale.

Premier constat, la part du lin dans la production mondiale de fibres textiles reste encore très limitée : 0,4 pour cent, contre 54,4 pour cent pour le polyester et 23,2 pour cent pour le coton, les deux premières fibres du podium. Mais son potentiel, comme son image sont inversement très élevés : selon une étude Tagwalk sur le lin, la proportion de designers ayant présenté au moins une silhouette en lin dans leurs collections de l’été 2021 a augmenté de 49 pour cent par rapport à l’été 2020. Dans la même veine, 64 pour cent des créateurs de maisons de luxe présentaient du lin dans leurs collections « de manière significative » pour l’été 2021. Et globalement, les looks en lin ont été boostés de 102 pour cent dans les collections féminines, toujours à l’été 2021 versus 2020.

Jacquemus SS21

Côté grand public, le lin a tout autant la cote, pour la mode comme pour la déco. Ces derniers mois de crise sanitaire ont peut-être accéléré « l’éveil vert » : le lin étant, on le sait, une plante cultivée sans OGM, et sans irrigation. Une plante vertueuse, « zéro déchet » qui arrive, en France et en Chine, au second rang des matières préférées les plus souvent citées dans l’habillement, derrière le coton qui jouit pourtant d’un leadership mondial. Selon le baromètre de la CELC, deux consommateurs sur trois au minimum (les Britanniques à 69,5 pour cent et les Italiens à 84,4 pour cent) ont l’intention de favoriser les matières naturelles dans leurs achats de mode cette année.

Fendi

A quel vêtement le lin est - il le plus associé dans l’imaginaire collectif ?

Sans surprise, la chemise en lin a de beaux jours devant elle, pour les consommateurs européens et indiens. La fibre est également fortement associée à la robe estivale en Italie. Sa perception est quelque peu différente en Chine, où les consommateurs l’associent plutôt à la veste. Dans la déco, le lin reste indissociable du linge de lit, notamment pour les Italiens et les Britanniques, tandis qu’Américains, Français et Indiens la voient pour les rideaux.

Quelles connaissance et image de la matière les consommateurs ont-ils ?

L’Italie, pays de savoir-faire textile, est le meilleur élève : 88,4 pour cent des consommateurs italiens identifient bien le lin comme une fibre naturelle, d’origine végétale. Ils sont suivis des Français (85 pour cent), puis des Chinois (81,1 pour cent). Le lin est aussi perçu globalement comme une fibre haut de gamme, dont le prix des articles est plus élevé (entre 68,1 pour cent pour les Italiens et 51 pour cent pour les Britanniques). Mais, pour grande majorité des panels de chaque marché étudié, cette différence de prix est justifiée, particulièrement par les Chinois et les Indiens.

L’écoresponsabilité devient, de plus en plus, un déclencheur dans les achats de mode

Si le style et le prix reste prédominant, la matière est un critère également très important notamment chez les Italiens. Un critère où les consommateurs incluent de plus en plus l’impact environnemental et la traçabilité. Ainsi, 80 pour cent des personnes interrogées au Royaume-Uni, 85 aux Etats-Unis et 89 en France se disent intéressées par le fait d’avoir des informations sur la traçabilité environnementale ou sociale d’un produit. En mode, comme en ameublement, ce sont autant d’exigences qui poussent le consommateur à acheter un produit en lin « responsable ». En France, notamment, l’étude révèle que près de 50 pour cent des personnes interrogées prévoient d’acheter des vêtements composés de lin au cours de l’année. En Chine et en Inde, marchés de 2,5 milliards d’habitants, les intentions d’achats déclarées sont impressionnantes : respectivement 75 et 82 pour cent.

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La fibre est associée à des valeurs positives, à commencer par sa légèreté et son confort, sa fraîcheur, le style qu’elle confère au produit et son faible impact environnemental. A la question : « Parmi les matières suivantes (coton, lin, laine, soie, cachemire, cuir, polyester etc.) quelles sont celles qui respectent le plus l’environnement », le lin arrive dans le top 3 des six panels étudiés. La fibre est numéro un en France, en Italie et en Chine.

Des résultats qui promettent au lin un bel avenir, « sur de vastes marchés qui pour certains, comme la Chine et l’Inde, sont appelés à devenir très stratégiques », a relevé Marie-Emmanuelle Belzung, la déléguée générale de la CELC.

Des opportunités à « cultiver » encore poussées par la certification European Flax, créée par la CELC et garantissant la traçabilité d’une fibre de lin premium cultivée en Europe de l’Ouest. Au mois de juin 2021, 439 entreprises étaient certifiées par le bureau Veritas dans 25 pays.

Côté filature et tissage, la filière reste, il est vrai, à construire en Europe. Plusieurs projets d’envergure sont en cours en France, plus ou moins avancés, comme celui du retour de celui qui fut un grand opérateur, Safilin. La coopérative agricole NatUp (1,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires) s’engage également, via sa branche fibre, pour accompagner le remaillage d’une filière dans le nord de la France, notamment avec le tisseur Lemaitre Demeestere. Il faut aussi compter, en Alsace avec le projet de Pierre Schmitt (groupe Velcorex) plutôt tourné lui vers des usages techniques. Enfin, deux projets sont au programme en Portugal, selon Marie-Emmanuelle Belzung, concernant tissus et maille.

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