La haute couture du créateur Julien Fournié s'invite dans le métavers
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Paris - Julien Fournié, l’une des quinze maisons au monde à bénéficier du label Haute Couture, se lance dans la mode virtuelle.
Les concepteurs des jeux vidéo “savent faire des avatars, mais ce n’est pas leur métier de faire un vêtement”. Pour y remédier, le styliste propulse la haute couture dans le “métavers”, le futur monde virtuel sur lequel travaillent les géants du numérique dont Facebook.
Lundi, le couturier parisien qui habille de richissimes clientes en Asie et au Moyen-Orient propulse sa mode élitiste “dans le métavers” via le jeu de Battle Royale Pubg Mobile en permettant aux joueurs d’acquérir vêtements et accessoires inspirés du ballet “Casse-Noisette” pour leur avatar. “On parle tous du métavers, mais on ne sait pas esthétiquement dans quelle forme cela va se traduire”, déclare à l’AFP Julien Fournié, 46 ans, “gamer” depuis l’âge de huit ans et dont la dernière collection haute couture était déjà inspirée des jeux vidéo. “Dans ces endroits virtuels, on incarne des personnages avec des identités (…) On va donner aux gens des idées de transformation vestimentaire en 3D pour qu’ils puissent s’incarner dans le métavers”, explique-t-il.
“Imaginaires fous”
Julien Fournié veut proposer “des imaginaires fous” à des gens privés de divertissements à cause du Covid et apporter plus de sophistication à l’univers des “geeks”. Les concepteurs des jeux vidéo “savent faire des avatars et des 'skins' (apparence d’un personnage ou d’un objet, ndlr), mais ce n’est pas leur métier de faire un vêtement. Ce volant n’existera jamais en réel !”, estime le créateur. Il a donc demandé à sa première d’atelier de créer des volumes en tissus et a ensuite fait des captations vidéo pour améliorer la qualité des images virtuelles. Les ingénieurs “se sont également pris la tête” pour reproduire les scintillements des sequins qui changent de nuance en fonction des lumières, se remémore-t-il. “Des geeks, des ingénieurs qui modélisent tout ça n’ont pas de sensibilité féminine (…) On veut rendre l’esthétique du virtuel plus élégante, plus fine, plus fun”, souligne Jean-Paul Cauvin, directeur général de la maison Julien Fournié.
La tâche est d’autant plus importante qu’il y a de plus en plus d’avatars et de personnages féminins dans les jeux actuellement. Balenciaga, qui a fait en septembre une incursion dans le très populaire jeu vidéo Fortnite, proposant vêtements et baskets à plus de 250 millions de joueurs, Gucci sur les Sims et la plateforme de jeux vidéo Roblox, Ralph Lauren habillant de ses tenues des avatars de Snapchat…
Pour la futurologue américaine Cathy Hackl, experte en métavers, il n’est pas surprenant que les marques de mode aient été pionnières en s’installant sur des plateformes. “Des vêtements sur un avatar - c’est quelque chose que nous pouvons comprendre et traduire dans des espaces virtuels (…) L’accès direct à l’avatar devient la prochaine opportunité d’accès direct au consommateur”, dit-elle à l’AFP.
Jouer… et communiquer
D’autant plus que depuis le début de la pandémie, on passe plus de temps sur les jeux vidéo, non seulement pour jouer, mais aussi pour communiquer, souligne Emmanuel Longère, expert tech chez Fabernovel, entreprise de création de produits et de services numériques. “La crise sanitaire a accéléré ce sujet. Ce concept du métavers redevenu populaire aujourd’hui est une réponse à la façon de passer du temps ensemble sur les mondes virtuels autrement que par visioconférence”, explique-t-il à l’AFP.
Pour les jeunes générations, leur image virtuelle est “extrêmement importante” et ils font évoluer leur personnage dans des “mondes virtuels gigantesques” que sont les jeux vidéo, ajoute-t-il. Un espace de liberté absolue, selon Julien Fournié, pour des jeunes qui peuvent se sentir incompris par leurs proches ou en recherche quant à leur identité sexuelle et de genre.
Pour les marques, présenter les produits virtuels sur des plateformes sert à gagner en notoriété auprès des jeunes consommateurs et offre des opportunités pour réduire les coûts de la conception et repenser les circuits de distribution. Écoresponsable, diront les adeptes de la mode virtuelle. “Ce sont des technologies gourmandes en énergie”, prévient toutefois Emmanuel Longère. (AFP)