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La bague pour hommes sort de l'ombre à l'ère de l'androgynie

Par AFP

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Objet "sensuel et sexuel", mais aussi attribut religieux et symbole de puissance, la bague pour hommes prend sa revanche à l'heure où la mode ne jure que par le mélange des genres. "Les bijoux d'hommes avaient disparu un petit peu de l'Histoire", souligne Yves Gastou, qui voit dans leur retour progressif une "revanche". L'antiquaire de 70 ans présente à l'Ecole des Arts Joalliers à Paris, avec le soutien de Van Cleef & Arpels, 669 bagues de sa collection constituée depuis 30 ans.

Les ventes mondiales de bijoux de luxe pour hommes ont augmenté de 22 pour cent en cinq ans pour atteindre 5,3 milliards de dollars en 2017, selon Euromonitor International, société d'études de marché citée par le New York Times. Le bracelet d'homme se porte de plus en plus, les bagues se font moins discrètes.

"Sous François Ier, les hommes étaient parés d'une perle à l'oreille, de colliers sublimes, de bracelets énormes et de bagues", rappelle Yves Gastou. Les préférées de sa collection: une bague à tête de mort avec un disque rond et brillant en hématite entre les dents, ou une bague cercueil richement décoré de fleurs en argent.

La bague "est un objet sensuel, sexuel, importantissime dans l'histoire", assure ce collectionneur élégant aux cheveux blancs qui en porte lui-même depuis l'adolescence, à l'époque sous les regards réprobateurs de son père et d'une société qui conjuguait le bijou au féminin.

Il est ravi de cet amalgame du masculin-féminin, "des hommes en corsets et des femmes en smokings" désormais incontournable comme l'a encore montré la dernière Fashion week de Paris.

"Les hommes se sont parés depuis toujours, des cavernes du néolithique aux palais de Versailles", souligne Delphine Antoine, commissaire de l'exposition et auteure du livre "Bagues d'homme" éditée par Albin Michel.

Les bijoux masculins ont connu des heures sombres au Moyen-Age pour retrouver leur éclat à partir du XVIIe siècle et le début du règne de l'apparence, souligne Jennifer Haddad, historienne de l'art. Voltaire écrit en 1736 dans Le Mondain que c'est "l'honnête homme qui s'adonne au luxe et aux ornements" et que "le superflu est une chose très nécessaire" au développement de l'économie. La Révolution française dévalorisera la coquetterie masculine, associée aux valeurs de l'Ancien Régime.

Au XIXe siècle, la bague est l'un des rares bijoux toléré et "l'homme élégant se limite à trois bagues dont une alliance et une chevalière", ajoute Mme Haddad.

Les hommes ont longtemps "refoulé leur part de féminité", regrette Yves Gastou. Les choses ont évolué mais dans certains milieux professionnels le bijou "n'est pas encore bien vu". Yves Gastou assure vendre des bagues à de "grands capitaines d'industrie qui ne les portent pas". "Ils n'osent pas arriver (parés de bagues) au conseil d'administration".

Pour Yves Gastou, la passion pour les bagues est née dans l'église. "Mon premier choc visuel, ce sont des bagues d'évêques. Il y a des processions, l'encens, les enfants du choeur, le décorum, les peintures, les sculpture, le frisson, la passion (...). Quand la cérémonie est finie toute l'église va baiser la main de l'évêque. Cela me fascine, cet univers d'hommes qui ont le droit de porter le bijou", raconte-il encore.

Pour Claudette Joannis, conservatrice du patrimoine et spécialiste du bijou, les bagues véhiculent une image de "virilité" surtout si elles sont portées à tous les doigts. Des codes exploités dans la publicité, par exemple pour le parfum Sauvage de Dior, montrant l'acteur Johnny Depp avec les mains couvertes de bracelets et d'anneaux.

Une sculpture de Jeanne d'Arc, "femme phallique toute-puissante" veille sur l'exposition qui fait voyager dans des univers de nobles, de doges de Venise, de voyous, de bikers ou d'hommes du désert "aussi beaux qu'un roi ou un pape avec leurs bagues en argent". (AFP)

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