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Exemple à suivre : Maison Doris, une marque à son image

Par Julia Garel

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En 2014 Doris Homburg lançait Maison Doris avant d'ouvrir, en 2015, les portes de sa boutique parisienne, au 26 rue Molière. Elle y accueille depuis des clientes fidèles, venues chercher un prêt-à-porter de qualité qui attire en vitrine l'œil d’autres créateurs plus connus comme Christophe Lemaire.

Dans le contexte actuel, celui d'une crise inédite qui remet notre système consumériste en question, Maison Doris montre quelle voie prendre. Les pièces sont de fabrication française, la cadence de production est raisonnable - une dizaine de nouveaux modèles par an - les matières proviennent le plus souvent de filatures françaises ou italiennes et les designs partagent la même intemporalité que ceux de Margaret Howell et Nehera, deux marques haut de gamme que Doris Homburg affectionne. Pas d’e-shop cependant, mais 30 mètres carrés près du Palais Royal, un aspect qui la distingue de ces nouvelles marques D2C où le digital sert souvent de porte d’entrée.

« Nous sommes un »

Pour raconter l’histoire de Maison Doris, il faut en premier lieu mentionner cette boutique de vêtements vintage que la créatrice tenait autrefois dans le 10e arrondissement. Ce goût pour les pièces anciennes, celles qui racontent une histoire, explique aussi la première profession de D. Homburg : costumière. Ancienne étudiante au Conservatoire Nationale de Théâtre, elle n'est pas passée par une école de stylisme mais elle admire les drapés de Madame Grès et qualifie le magazine Encens de « Bible ». Tout ça l'a mené vers la création d'une marque à son image, où les vêtements ont du charisme, ne cèdent à aucune tendance et colorent la silhouette de teintes neutres.

Sa personnalité semble être ce qui lie tous les pans de cette petite entreprise qui ne compte qu’un seul employé. « Nous sommes un » déclare, amusée, la créatrice et entrepreneuse, contactée par téléphone. De la conception du design à la coupe, en passant par la vente, la communication, et à l'exception de la couture (prise en charge par un atelier externe), un seul nom apparaît, celui de Doris Homburg. Un modèle restreint qui a ses avantages et ses inconvénients mais qui explique aussi certainement la cohérence charismatique de la marque, dont le compte Instagram, plein d’honnêteté et d’humour, sait créer l’envie.

Le mythe de la parisienne

Entre deux coupes et des commandes pour des clients japonais - Doris Homburg a semble-t-il su conserver la clientèle japonaise qui appréciait le vintage français de sa première boutique - la costumière/femme d’affaires tourne avec son mari des vidéos pour son compte Instagram. L’image de la marque se lit ici, dans les photos et IGTV d’un compte généreux où la figure de Doris Homburg se voit multiplier d’une image à une autre, car, bien sûr, le mannequin c’est aussi elle.

Habillée de ses collections dont la Grèce Antique lui a soufflé l’inspiration, Doris Homburg fait profiter une communauté intime (1 552 abonnées) de sa photogénie et de sa personnalité entière avec laquelle elle façonne sa marque. On la voit dans sa boutique, conseiller ses clientes, sur une pelouse, dans l’ampleur d’une robe fushia, chez elle, un verre à la main, poussant un « coup de gueule » dans un esprit que ses clients étrangers qualifieraient certainement de « bien français », ou encore dans sa cuisine, avec son mari et puis un peu partout dans les rues de Paris, capitalisant, l’air de rien, sur ce fructueux mythe de la parisienne.

Là où d’autres échouent en singeant une réalité trop sophistiquée et dénuée de réalisme, Maison Doris réussit en tirant de sa personnalité le charme authentique d’un vrai Paris. Et si la petitesse de son entreprise ne lui autorise pas la force de frappe commerciale de Jeanne Damas et de sa marque Rouje ou du label éponyme d’Ines de la Fressange, c’est aussi sa taille réduite qui lui permet un aller-retour direct et sans compromis entre son identité de parisienne et celle de sa marque.

« Je déteste m’habiller »

Parmi les pièces qui se vendent le mieux, D. Homburg cite la jupe Antoinette. « Elle est dans un tissu d’une faille de coton de chez Lanvin, ça ressemble à du taffetas et ça reste comme une cloche. J’avais travaillé les plis pour penser aux femmes qui ont un peu de ventre. C’est une jupe qui va avec tout, qui convient à tous les âges et du matin au soir. » Elle mentionne aussi le pantalon Marlène : « tout simple, à pinces. Je n’ai rien inventé ». Deux pièces qui reflètent l’esprit de la maison : des vêtements faciles à vivre, dans des matières de qualité et qui sont vendus entre 85 euros, pour un haut, et 450 euros pour une robe en soie et lurex. Les pièces sont disponibles dans sa boutique ainsi que chez des multimarques japonais.

« Je déteste m’habiller, ma garde-robe est petite. J’ai un style défini et je trouve que chaque vêtement doit révéler la personnalité. J’aime quand le vêtement n’est pas trop plein d’éclat et n'étouffe pas la personne », confie l'entrepreneuse dont les pièces ne suivent aucune tendance, sinon son style. Cet état d'esprit, nombreux sont les acteurs de la mode à le partager en réaction aux problèmes éthiques et environnementaux posés par l’industrie de la fast fashion. Depuis quelques semaines, dans la situation de crise liée au covid-19, on lit partout les mots optimistes d’experts prédisant un lendemain plus serein en terme de consommation vestimentaire, une sorte de remise à zéro, voire de « Renaissance », selon l’agence Nelly Rodi. Le designer italien Giorgio Armani a même écrit le 3 avril une lettre ouverte, publiée sur le site de WWD, déclarant : « le système de la mode doit ralentir ».

L’échelle a beau ne pas être la même, il semble donc que Maison Doris ait un temps d’avance sur les enseignes de prêt-à-porter, emmêlées dans des problèmes d’approvisionnement où de surplus de stock. Bien sûr, d’autres difficultés se posent, mais si la petite création française indépendante, dont Maison Doris fait partie, ressort indemne de cette crise, il se pourrait bien que l’avenir s’offre à elle.

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Crédits : Maison Doris. Portrait par Tony Parisi.

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