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Exemple à suivre : Les Cachotières s'apprêtent à multiplier le modèle de la location de vêtements

Par Julia Garel

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Mode|INTERVIEW

A l’heure où la crise du covid-19 ralentit et paralyse l'industrie de la mode, une grande partie de ses acteurs parie sur l'accélération de son évolution éco-responsable. C’est notamment pourquoi le modèle de la location, dont le potentiel a récemment sauté aux yeux de plusieurs enseignes, va devenir l’un des sujets centraux post-confinement. C’est en tout cas l'avis d’Agathe Cuvelier, fondatrice et dirigeante du site Les Cachotières, plateforme de location de vêtement chics entre particuliers. Lancé en mars 2016, le site rassemble aujourd’hui 15 000 locateurs, 1 700 propriétaires et a vu son chiffre d’affaires progressé entre 60 et 80 pour cent par an ces dernières années.

Contactée par FashionUnited, Agathe Cuvelier raconte comment s'est mis en place le partenariat entre Les Cachotières et l'enseigne Ba&sh et comment celui-ci a récemment conduit la société a créer une nouvelle offre b2b, proposant à des marques ses services d'expert en location de vêtement.

Pourriez-vous résumer le concept des Cachotières ?

Agathe Cuvelier : Les Cachotières est un site de location de vêtement chics entre particuliers avec la particularité que tous les stocks sont chez nous. On permet aux femmes de louer des vêtements habillés pour 5 à 10 pour cent de leur prix neuf, directement depuis notre site internet sur lequel nous avons plus de 3 000 références et 300 marques. Les modèles proposés coûtent en valeur neuve d’achat entre 120 et 900 euros et sont proposés en 35 et 90 euros pour quatre jours. Sachant que le prix moyen est de 40 euros pour 4 jours, comprenant le transport aller-retour et le pressing. Les loueurs peuvent demander plusieurs articles dans le colis et l’on rembourse ceux qui n’ont pas été portés. On a également une offre essayage pour 20 euros.

Quelle(s) marque(s) rencontre(nt) le plus de succès à la location chez Les Cachotières ?

Les marques qui plaisent le plus sont, en grosse majorité, les marques du moment, celles que l’on voit sur les réseaux sociaux. Mais il y a aussi des marques totalement inconnues qui cartonnent car c’est surtout une question de modèles, de styles, de couleurs, etc. Cela dépend aussi des saisons.

Notre positionnement est moyen haut de gamme de type Maje, Sandro, Sézane. Nous n’acceptons ni le luxe ni les marques qui sont trop entrée de gamme de type Zara.

La start-up américaine Rent the Runway a-t-elle été un point d'inspiration pour vous ?

La start-up Rent the Runway a été une inspiration lors de l’étude de marché. Forcément quand on voit qu’il y a un modèle qui cartonne à l’étranger, on s’en inspire. Par contre leur concept n’est pas le même puisque chez nous, tout vient des particuliers et nous n’avons pas d’offre d’abonnement.

Portrait : Agathe Cuvelier.

Concernant votre partenariat avec la marque Ba&sh, quelle forme celui-ci prend-t-il et quelles observations ou enseignements pouvez-vous déjà en tirer ?

Ça a démarré en juin 2019, lorsque Ba&sh commençait à faire de la location, justement avec Rent the Runway. Ils se sont alors aperçus du potentiel de la location aux Etats-Unis et se sont dit qu’ils voulaient absolument le faire en Europe et donc être la première marque à proposer de la location ici. A l’époque, il n’y avait aucune donnée sur la location, sur quelle type de pièce allait plaire ou pas etc. Ils nous ont donc contacté pour que nous fassions des premiers tests ensemble. Ils nous ont proposé pas mal d'articles que nous avons mis en location sur notre site et en retour nous leur avons fait tout un reporting de data sur le fait que leurs vêtements fonctionnaient très bien pour la location.

On est revenu vers eux pour leur dire quelles étaient les coupes, matières, couleurs qui fonctionnaient le mieux, à quel prix ils pouvaient les proposer à la location, quel âge avait la cliente qui louait du Ba&sh etc. Cela les a conforté dans l’idée qu’il y avait vraiment un gros potentiel pour leur marque à la location, au moins en France.

On a donc co-construit une offre ensemble pour qu’il puisse lancer leur site de location. C’est nous qui nous sommes occupés de créer leur site baptisé rybc.ba-sh (rent your Ba&sh closet). Ce site on le retrouve directement via le site de la marque. C’est un site créé par Les Cachotières mais sur le design de Ba&sh, la cliente ne se rend donc pas compte qu’elle sort du site de Ba&sh. Derrière, c’est nous qui nous occupons de tout, aussi bien de la gestion du site que de la logistique de la location, les tenues Ba&sh sont chez nous, dans nos locaux.

Le site a été lancé en début d’année 2020. La communication était prévue pour la période des mariages, mais le confinement a changé les plans. Malgré la non-communication, nous avons quand même eu pas mal de commandes et de bons retours. Ça laisse présager un bon potentiel bien que ça soit malheureusement en stand-by. On espère que l’on pourra très prochainement le relancer. Ba&sh a d’ailleurs prévu de mettre environ 200 nouvelles pièces pour réactualiser. On a revu aussi les prix et ils revoient aussi les visuels. On a prévu pas mal de featuring pour la suite.

Prévoyez-vous de futurs partenariats avec des marques ou enseignes de prêt-à-porter ?

Oui. Cela n’était pas prévu dans notre modèle initial mais avec le test de Ba&sh on s’est rendu compte que nous étions complètement capables de le proposer pour d’autres marques et que cela était aussi hyper intéressant pour nous. Donc nous sommes en train de lancer notre offre b2b. Ça s’appelle Les Cachotières for brands, le site est sorti il y a une semaine. Cela s’adresse donc aux marques et l’idée est donc de leur proposer de s’occuper de la gestion des pièces en location et de créer leur site internet.

Comment gérez vous la période de confinement et comment vous préparez-vous à l'après ?

On a pas trop eu le choix car nos bureaux sont dans un espace public qui est un gros incubateur de start-up qui s’appelle EuraTechnologie et qui est basé à Lille. Ce lieu a fermé le 16 mars, premier jour du confinement. Depuis, nous n’avons plus du tout accès à nos locaux, nous n’avons donc même pas accès au stock et n’avons pas eu d’autres choix que de fermer le site, ou en tout cas, d’empêcher les commandes durant toute la durée du confinement. En revanche, nous permettons toujours aux clientes de passer leur commande pour les mois qui vont suivre (mai, juin, juillet, août). Mais pour le moment tout est à l’arrêt, chacun est chez soi.

Certains travaillent en télétravaille d’autres sont au chômage technique, notamment à la logistique puisqu’il ne se passe plus rien. Et sinon, l’équipe technique travaille parce que justement nous lançons notre offre pour les marques et avons plein de choses à faire techniquement sur notre infrastructure. Donc nous travaillons là-dessus afin qu’à notre retour nous puissions accueillir plusieurs nouvelles marques d’un coup et que nous soyons capables de lancer plusieurs sites à la fois très rapidement et d’avoir ainsi plus de clients d’un seul coup.

En parallèle, nous retravaillons tous nos process, des choses que nous n’avons pas le temps de faire : process logistiques, bible sur la relation client, etc. On range la boîte pour être encore meilleur lorsque ça reprendra. De mon côté je me suis assurée que nous figions toutes les dépenses inutiles, que nous mettions au chômage ceux qui doivent l'être, que nous faisions les demandes d’aides à l’Etat, etc. afin que la boîte soit sous cloche durant les mois du confinement mais que nous puissions avancer dès que nous revenons sans être trop short en trésorerie.

Suite à la crise du coronavirus, allez-vous devoir modifier votre façon de travailler ou faire évoluer votre offre ? Avez-vous perçu de nouveaux besoins chez vos clients ?

Nous n’avons pas prévu de changer notre fonctionnement. Nous étions déjà assez portés sur le télétravail, chacun peut travailler depuis chez soi s’il le souhaite, sauf à la logistique où forcément il faut du présentiel.

Concernant notre offre, on espère surfer sur le fait que les gens vont enfin se rendre compte qu’il faut consommer de manière plus responsable, qu’il faut arrêter de surstocker, de surconsommer, de ne plus être dans la possession mais plutôt dans l’usage. La location de vêtements est une solution à ça. On va vraiment axer notre communication la-dessus. Pour ce qui est de notre offre b2b, les marques vont avoir énormément de stocks, là c’est vraiment une grosse alerte pour eux, sur le fait que le textile est sur un modèle ancien. La location de vêtement devrait faire partie de l’un des sujets les plus importants pour les marques, prochainement.

Pourquoi ne pas avoir opté pour la formule d'abonnement ? Est-ce quelque chose que vous envisagez ?

On est positionné sur des modèles d’occasion, on est pas sur des tenues de tous les jours. Ça vient du fait que notre modèle était au départ uniquement entre particuliers, l’objectif était que les gens nous confient les pièces qu’ils ont portées pour un évènement. Il n’y avait pas d’intérêt à passer sur de l’abonnement puisque les occasions de porter ces tenues se résume à trois ou quatre fois par an donc le sujet de l’abonnement ne se posait pas. En revanche depuis que nous commençons à travailler avec les marques, on y réfléchit, car pour eux ça pourrait être intéressant. On l’envisage donc pour l’avenir mais pas pour tout de suite car ça n’est pas notre coeur de métier. L’abonnement, il faut le travailler, ça prend du temps, nous préférons nous focaliser sur ce que nous savons faire.

L’Habibliothèque a périclité en raison, notamment, d'un manque de stock. Comment faites-vous pour palier à cet éventuel problème et inciter des propriétaires à louer leurs pièces sur Les Cachotières ?

Le modèle de l’Habibliothèque était basé sur l’achat auprès des marques, il leur fallait donc énormément de trésorerie et les marques ont des minimas. Elles ne pouvaient donc pas tout à fait choisir ce qu’elles voulaient. Ce qui fait qu’elles se retrouvaient avec pas mal de stock qui ne se louait pas et de la trésorerie immobilisée. En plus de ça, toutes marques n'acceptaient pas de leur vendre du stock donc elles étaient un peu bloquées avec les marques qui acceptaient de leur vendre du stock sur des petits minima.

La deuxième chose qui a fait que ça été compliqué pour l’Habibliothèque, c’est qu’elles se sont lancées très tôt alors que le marché n’était pas encore mûr. Elles se sont donc retrouvées à ne plus avoir de trésorerie au un moment où le marché a décollé. Malheureusement pour elles, je pense que si elles s’étaient lancées un peu plus tard, elles auraient tenus un peu plus longtemps.

Dernière chose, l’abonnement est vraiment un modèle qui est compliqué et c’est pour ça que nous ne nous sommes pas mis dessus. Il faut très bien calculer la rotation des vêtements, c’est pas forcément rentable très vite et il faut effectivement beaucoup de stocks.

De notre côté, nous ne sommes pas du tout sur le même modèle et nous n’achetons pas du tout de stock. Niveau trésorie ça n’a donc rien à voir, tout provient des particuliers. De plus, nous avons constitué une grosse communauté que nous sommes toujours en train de travailler. Dès que nous avons des besoins qui proviennent de clientèles locataires, on active notre communauté des propriétaires et ont leur demande si elles ont la pièce recherchée. En général, on arrive à se procurer le modèle assez rapidement.

Ce qui est intéressant, c’est que les clientes qui louent ne cherchent pas forcément les modèles de la collection actuelle. Il peut y avoir des pièces qu’elles ont adorés, notamment chez ba&sh ou Sézane, provenant des collections d’il y a 6 mois, un an, deux ans et que l’on ne trouve plus nulle part. Mais nous les avons à la location puisque ça vient de propriétaires. Si nous passions par les marques, nous n’y aurions pas forcément accès car ce sont des pièces qui sont souvent en rupture de stocks.

Maintenant, on commence à avoir pas mal de volume. Et parfois il faut 30 pièces dans la même taille du même modèle, là ça devient plus compliqué et c’est pour ça que le fait de travailler avec les marques en marque blanche nous permet également de faire rentrer des pièces parce qu’en contrepartie on leur demande (éventuellement) de nous fournir du stock pour Les Cachotières.

De manière générale et durant la période de confinement, comment entretenez-vous le lien avec votre communauté ?

On a arrêté de communiquer sur les vêtements que nous proposons à la location car c’est un peu hors sujet en ce moment et on ne se sent pas très à l’aise avec l’idée de faire du marketing maintenant. Du coup, on essaie de divertir sur les réseaux sociaux. Mais c’est ce que toutes les marques font déjà et on peut en avoir un peu marre au bout d’un moment. Donc on ralentit un peu. On prépare surtout la communication du retour.

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Crédit : Les cachotières. Portrait : Agathe Cuvelier.

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