Didier Grumbach : « la mode mondiale est et restera à Paris »
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Paris - Depuis des siècles Paris est la capitale de la mode internationale et le restera, veut croire Didier Grumbach, industriel français et ex-président de la Fédération de la haute couture et de la mode, qui a largement contribué au développement du prêt-à-porter en France. « La mode mondiale se trouve à Paris et restera à Paris, c'était déjà le cas du temps de Marie-Antoinette et c'est toujours exact aujourd'hui », dit-il à l'AFP en évoquant la dernière reine de l'Ancien Régime, qui a révolutionné le vêtement féminin au 18e siècle avant d'être guillotinée pendant la Révolution.
Agé de 83 ans, l'homme d'affaires aux multiples facettes, qui a présidé entre 1998 et 2014 la Fédération de la mode française sort « Mémoires de mode », où il raconte l'émergence et le développement du prêt-à-porter et l'évolution des fashion weeks à Paris.
« Le prêt-à-porter a commencé à exister dans les années 50 et la fédération du prêt-à porter faisait des annonces pour encourager les femmes à s'habiller « tout fait » en 1954 », se souvient-il. Avant cela, « votre grand-mère allait dans une mercerie, achetait du tissu et ensuite rencontrait une couturière ».
« Personne n'y croyait »
Avec l'entreprise familiale de la confection du luxe, C. Mendès, il a contribué à l'évolution du prêt-à-porter du luxe pour Saint Laurent, Givenchy ou Valentino.
« La haute couture et le prêt-à-porter sont devenus complémentaires alors que pendant des décennies elles étaient inconciliables »
« La révolution c'était de rentrer dans un magasin et de ressortir habillée autrement, c'était stupéfiant et on n'y croyait pas du tout au début. Cela a changé les habitudes des consommatrices et sur l'industrie » du vêtement. « Les couturiers ne connaissaient pas le prêt-à-porter, ne savaient pas le faire, il y a eu un besoin pendant une longue période d'une industrie intermédiaire qui était capable de transformer les croquis des couturiers en vêtements portables ».
En 1967, il inaugure à New York une première filiale américaine d'une société de prêt-à-porter français et ouvre la même année des usines de prêt-à-porter en France à Chalonnes-sur-Loire et à Angers.
Et si aujourd'hui très peu de gens s'habillent sur mesure, il pense que la haute couture a toujours de beaux jours devant elle. « La haute couture et le prêt-à-porter sont devenus complémentaires alors que pendant des décennies elles étaient inconciliables ».
Vitrine internationale
« L'essentiel est que la haute couture fasse rêver et qu'elle intéresse une clientèle internationale et qu'elle rejaillisse sur la marque en l'enrichissant », dit-il.
En 1968, Cristobal Balenciaga fermait sa maison de couture. Aujourd'hui le directeur artistique géorgien de la maison Balenciaga, Demna Gvasalia, vient d'annoncer que celle-ci souhaitait renouer avec la haute couture. « Une décision intelligente », selon Didier Grumbach.
Le fait que des étrangers comme l'Italien Giorgio Armani rejoignent encore la semaine de la haute couture qui n'existe qu'à Paris est la preuve « que le système marche bien ».
Lorsque Didier Grumbach invitait dans les années 1970 des stars étrangères à défiler à Paris, l'initiative était au départ mal comprise. « En faisant venir des gens comme Issey Miyake du Japon ou Ossie Clark de Londres alors qu'ils n'avaient rien à faire à Paris - ils ne produisaient pas et n'y vendaient pas -, on a déclenché un mouvement qui s'est amplifié. Et quand Yohji Yamamoto ou Comme des garçons ont rejoint Issey à Paris, cela a encore boosté la mode parisienne », souligne-t-il.
En tant que président de la Fédération, il a œuvré à ce qu'il n'y ait plus de créneaux privilégiés pour les grandes maisons historiques aux dépens des marques émergentes, un principe toujours en vigueur : les nouveaux entrants au calendrier officiel de la Fashion week qui a démarré lundi défilent aux côtés de Dior, Chanel ou Louis Vuitton. (AFP)
Photo : Dior - Haute couture PE20