Comment aider les créateurs émergents ? Les exemples à l’étranger
loading...
L’accompagnement des créateurs de mode serait-il plus structuré à Londres, Bruxelles, Milan et New-York qu’à Paris ? C’est en tout cas le constat que fait, en l’écrivant noir sur blanc, Lyne Cohen-Solal sur son rapport remis mi-décembre à Emmanuel Macron et Fleur Pellerin lors de la tenue du dernier comité stratégique de filière consacrée à la mode.
Premier exemple avec Londres et le British Fashion Council (fondé en 1983) dont la stratégie - orientée vers le commerce, la formation, le digital et l’investissement - est financée par des industriels, des sponsors commerciaux et la puissance publique (notamment la Ville de Londres et les fonds de développements régionaux européens).
Aide financière et soutien à la distribution sur plusieurs années
Cette chambre syndicale britannique de la mode apporte depuis 1993, via un dispositif de parrainage baptisé NewGen, un soutien concret et efficace aux talents les plus prometteurs sur plusieurs saisons. « Nous sélectionnons une dizaine de stylistes, que nous accompagnons pendant six saisons. Cela nous permet de voir leurs qualités, mais aussi leurs handicaps, et ainsi de mieux les aider », explique Anna Orsini, consultante stratégique du BFC et membre du comité NewGen. Ce soutien passe par une aide financière, mais s’étend également à toutes les problématiques liées au lancement d’une marque, du cashflow à la distribution, en passant par la protection du nom de la marque.
Ainsi, pour la saison printemps-été 2016, NewGen continue à soutenir les sélectionnés des saisons précédentes (1205, Ashley Willians et Ryan Lo, Claire Barrow, Danielle Romeril, Molly Goddard, Marta Jakubowski et Sadie Willians, sans oublier la française Faustine Steinmetz, entrée dans le dispositif l’an dernier. « NewGen accompagne de manière très concrète les jeunes sur le marché. On les aide sur le produit et la distribution. Ils sont d’abord vendus auprès de quatre multimarques pilotes dans le monde, en Asie, aux États-Unis et en Europe (Paris, Londres). Nous organisons aussi les London Showroom, afin qu’ils puissent rencontrer des acheteurs potentiels sur différents marchés stratégiques ».
Le programme London Showroom, qui permet aux créateurs débutants de NewGen de présenter leur travail aux acheteurs de par le monde, a été lancé en 2008 et a compté jusqu'à présent 37 éditions pour un total de 150 designers et 6 500 commandes. « Avec London Showroom, nous avons choisi de les emmener dans des places très ciblées : Paris, qui est incontournable pour le business, New York, pour rencontrer la presse la plus prestigieuse et les détaillants américains, Los Angeles, pour le stylisme et le red carpet, et Hong Kong, car c’est la porte d’entrée pour le marché asiatique, un marché primordial aussi pour la mode masculine ».
Deuxieme exemple, les Etats-Unis avec le Council of Fashion Designers of America (CFDA), association présidée par Diana Von Furstemberg, qui octroie des prix et des bourses, met en avant un ou deux créateurs par an, finance des incubateurs, et assure la formation de réseaux avec les usines, certains revendeurs et grands magasins. Plus proche de nous, à Bruxelles, le MAD, créé en 2006, suit un laboratoire d’une quinzaine de designers (avec coaches, séminaires), travaille avec les institutions européennes, anime des rencontres de haut niveau comme la « Fashion European Summit ».
Trois programmes de soutien en Italie
En Italie, la chambre de la mode (Camera della Moda) a mis en œuvre trois programmes de soutien : tout d’abord le programme « Nude » (New uncoming design) qui aide les jeunes créateurs à défiler dans le calendrier officiel. Un coût forfaitaire (lieu et coûts techniques) sont proposés. C’est une aide en nature. Ensuite, le programme « Next Generation » : c’est un concours qui permet aux lauréats de voir leurs collections produites puis présentées dans Nude. Et enfin, « les incubateurs de la mode », en partenariat avec la mairie de Milan, offrent des services divers aux jeunes créateurs (accompagnement marketing, financier, administratif...). Depuis la création de ces programmes, 21 maisons ont été accompagnées, aujourd’hui la moitié d’entre elles sont sur le marché. Les créateurs peuvent être accompagnés une dizaine d’années si besoin.