Bangladesh: Yunus prêt à défendre les réfugiés rohingyas et l'industrie textile
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Dacca - Soutenir les réfugiés rohingyas et défendre le secteur-clé du textile : dix jours après son entrée en fonctions à la tête du gouvernement par intérim du Bangladesh, Muhammad Yunus a fixé dimanche deux grandes priorités dans son premier discours majeur.
Rentré d'Europe le 8 août, après que la Première ministre Sheikh Hasina a été chassée du pouvoir par une série de manifestations réprimées dans le sang, le Prix Nobel de la paix 2006 a aussi dénoncé la "dictature brutale" de l'ancienne dirigeante et "le pire massacre civil depuis l'indépendance".
"Notre gouvernement continuera de soutenir le million de Rohingyas qui sont réfugiés au Bangladesh", a affirmé M. Yunus à Dacca, devant une assemblée de diplomates et de représentants de l'ONU.
La plupart des réfugiés Rohingyas au Bangladesh ont fui la Birmanie voisine en 2017 pour échapper aux persécutions de l'armée birmane, qui font aujourd'hui l'objet d'une enquête pour génocide menée par les Nations unies.
"Nous avons besoin des efforts soutenus de la communauté internationale pour les opérations humanitaires en faveur des Rohingyas et pour leur éventuel retour dans leur pays, la Birmanie, dans la sécurité, la dignité et la pleine garantie de leurs droits", a-t-il poursuivi.
Deuxième objectif majeur du nouveau chef de gouvernement, confronté au défi monumental de conduire des réformes démocratiques : protéger l'industrie textile. Avec ses 3.500 usines, ce secteur crucial pèse 85% des exportations bangladaises, qui s'élèvent au total à 55 milliards de dollars par an.
Certains fournisseurs se sont détournés du pays d'Asie du Sud pendant les troubles qui ont conduit à la chute de l'ex-Première ministre, après quinze années à la tête du pays.
"Nous ne tolérerons aucune tentative visant à perturber la chaîne mondiale d'approvisionnement en vêtements, dans laquelle nous sommes un acteur-clé", a déclaré M. Yunus.
Economiste de formation, il a été distingué par le Nobel pour ses travaux pionniers en matière de développement du microcrédit, qui a aidé des millions de Bangladais à sortir de la pauvreté.
"Enquête impartiale"
Sa prédécesseure, Sheikh Hasina, 76 ans, s'est enfuie en hélicoptère vers l'Inde le 5 août alors que les rues de Dacca étaient envahies par les manifestants réclamant son départ au bout de semaines de manifestations.
"Des centaines de milliers de nos vaillants étudiants et citoyens se sont soulevés contre la dictature brutale de Sheikh Hasina", a lancé M. Yunus lors de son discours, laissant transparaître son émotion à plusieurs reprises.
"Elle a fui le pays, mais seulement après que les forces de sécurité et la branche étudiante de son parti ont commis le pire massacre de civils depuis l'indépendance du pays", a-t-il ajouté. "Des centaines de personnes ont été tuées, des milliers ont été blessées".
Les manifestations, qui ont lieu de juillet à début août, et leur répression ont fait plus de 450 morts, dont 42 policiers, selon un décompte de l'AFP effectué d'après des sources hospitalières et policières.
Une équipe de l'ONU est attendue au Bangladesh la semaine prochaine pour enquêter sur les exactions commises pendant la révolution étudiante.
"Nous voulons une enquête impartiale et internationalement crédible sur le massacre", a demandé dimanche Yunus se disant prêt à fournir "tout le soutien dont les enquêteurs de l'ONU ont besoin."
M. Yunus qui a pris le titre de "conseiller en chef" dans le gouvernement intérimaire, composé de civils à l'exception d'un général de brigade à la retraite, a réitéré sa volonté d'organiser des élections "dès que nous aurons mené à bien les réformes indispensables au niveau de la commission électorale, de la justice, de l'administration de la police, et des medias".
"La dictature de Sheikh Hasina a détruit toutes les institutions du pays", a-t-il estimé en assurant que son administration fera "des efforts sincères pour promouvoir la réconciliation nationale".(AFP)