Au Soudan, premiers défilés de mode mixte depuis la chute de Béchir
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Khartoum - Des mannequins hommes et femmes ont participé ensemble à des défilés au Soudan la semaine dernière, des événements impensables sous le règne de l’ex-président Omar el-Béchir, destitué en 2019 sous la pression de la rue.
Sur le podium, les mannequins des deux sexes ont arboré des tenues colorées, des robes traditionnelles blanches et des turbans soudanais. Deux défilés ont été organisés. L’un d’eux, dans un hôtel de Khartoum surplombant le Nil, a rassemblé un public de passionnés de mode qui a applaudi les créations présentées sur fond de musique soudanaise.
“Autrefois, c’était très difficile d’organiser un défilé comme celui-là, on n’imaginait même pas pouvoir obtenir l’autorisation des autorités”, a réagi auprès de l’AFP le styliste soudanais Khaled Onsa. L’autocrate Omar el-Béchir a dirigé le pays d’une main de fer pendant trois décennies avant d’être destitué par l’armée en avril 2019, après plusieurs mois de soulèvement populaire.
Il avait imposé le strict respect de la loi islamique depuis sa prise de pouvoir en 1989 à la faveur d’un coup d’Etat, rendant illicite l’alcool ou les vêtements jugés “légers” pour les femmes. Le gouvernement de transition actuel du Soudan, installé peu après la chute de M. Béchir, a entamé une politique de démantèlement de l’ancien régime et de ses politiques conservatrices.
Les lois sur l’ordre public de 1996 qui autorisaient la police à agir contre les personnes habillées de façon “indécente” ont notamment été abrogées. Nermin Awad Sharif, organisatrice du second défilé, estime que les tenues proposées ne rencontrent pas d’opposition de la part du public. “Ce que nous offrons, ce sont des costumes que tout le monde acceptera”, explique-t-elle à l’AFP.
Sawsan Hassan, une spectatrice, se souvient du temps où elle était arrêtée dans la rue par les policiers pour ne pas porter de foulard. Elle raconte aussi avoir assisté, il y a une dizaine d’années, à un défilé qui s’est terminé par l’arrestation des mannequins et des organisateurs. “Certains ont même été fouettés”.
En juin 2010, une vingtaine de personnes avaient été arrêtées après un défilé de mode mixte, le premier du genre dans la capitale soudanaise. Selon le styliste Hossam Mohamed Ahmed, les nouveaux défilés montrent un changement en cours au Soudan. “Je peux maintenant montrer aux gens mes créations. C’était impossible avant”. “C’est le Soudan dans toute sa liberté”, résume Mahid Muhammad, un spectateur qui a assisté à un des défilés. (AFP)