Alara à Lagos: du luxe sur mesure pour la bourgeoisie africaine du XXIeme siècle
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Prenez un des architectes les plus en vue du moment, une poignée des plus grands couturiers africains et le pape de la "new Africa cuisine", tout droit venu de Brooklyn: vous obtiendrez Alara, le concept-store le plus branché d'Afrique, en plein coeur de Lagos. Présentation.
Le Nigeria compte plus de milliardaires qu'on ne le croit: la première puissance économique d'Afrique abrite 11 des 50 plus grosses fortunes du continent, selon le classement 2014 du magazine Forbes. Mais Lagos, la capitale économique, compte encore peu de boutiques de luxe. L'avocate et femme d'affaires Reni Folawiyo, épouse de l'entrepreneur Tunde Folawiyo --l'un des 11 Nigérians du classement Forbes-- a décidé d'offrir à la bourgeoisie du Nigeria la crème de la mode, du design et de l'art africain, mêlée à une sélection de pièces des grands créateurs occidentaux, dans un bâtiment au style épuré sur quatre niveaux. Dans la boutique Alara, ouverte depuis le début de l'année, pas d'affluence, mais quelques habitués qui savent ce qu'ils recherchent et repartent rarement les mains vides. Les étiquettes sont en dollars et alignent souvent plusieurs zéros. Mais la clientèle est peu regardante: elle "voyage beaucoup" et "peut acheter dans n'importe quel magasin du monde", explique Mme Folawiyo. Le fait de pouvoir trouver tout ce dont elle rêve sous un même toit n'a donc pas de prix.
Mais qu'est ce qu'ont donc en commun les jupes rétro en pagne coloré de l'Italo-haïtienne Stella Jean, les lunettes futuristes de l'artiste kényan Cyrus Kabiru, les derbies à paillettes rouges de la marque italienne Marni et les sacs en python 100% nigérians de Zashadu ?
'Flamboyance' africaine
Ils reflètent "la flamboyance des Africains", explique l'élégante propriétaire des lieux. "On aime les couleurs, la parure... c'est notre façon de nous exprimer. Alors c'est un magasin plein d'ornements: des pièces à la fois magnifiques et assez spectaculaires". Par ailleurs, les femmes africaines "ne correspondent pas forcément aux normes internationales en termes de carrure et de taille", poursuit-elle. C'est pourquoi Alara propose du luxe sur-mesure à la femme nigériane - et africaine - du XXIe siècle "qui voyage beaucoup mais reste très attachée à ses traditions".
Comme dans de nombreux magasins de luxe dans le monde, le concept-store offre aussi un service de "shopping personnalisé": avec une personne dédiée, dans un salon privé, pour conseiller la cliente pendant plusieurs heures... Le bâtiment d'Alara est un imposant bloc ocre et noir dont les motifs carrés et ajourés sont un clin d'oeil à l'Adire, un textile traditionnel nigérian. Ses grandes baies vitrées laissent pénétrer partout la lumière crue de Lagos. C'est la première oeuvre de cette envergure sur le sol africain de l'architecte britannique d'origine ghanéenne David Adjaye, qui vient de réaliser le Musée de l'histoire de la culture africaine-américaine de Washington. Alara pourrait contribuer à changer l'image de Lagos, mégalopole chaotique de quelque 20 millions d'habitants, plutôt connue pour ses embouteillages géants, ses quartiers populaires surpeuplés et ses infrastructures en mauvais état.
Un concept store comme source d'inspiration pour les jeunes
Le grand couturier nigérian Duro Olowu, qui vit entre Londres et New-York et compte parmi ses clientes la première dame des Etats-Unis, Michelle Obama, a décidé de faire confiance à Alara: c'est la première fois que le créateur, réputé pour ses blouses romantiques et ses grandes robes taille haute en patchwork, est vendu en Afrique. Il a grandi à Lagos et s'y rend plusieurs fois par an mais refusait jusque-là d'être vendu dans sa ville natale, parce qu'il estimait qu'elle était perçue comme "un mic-mac de choses mal présentées". Alara, à ses yeux, innove. "J'aime l'idée que ce magasin est aussi un endroit qui peut inspirer les jeunes (Nigérians) qui y viennent" et stimuler leur créativité, a-t-il expliqué à l'AFP depuis Londres par téléphone. (AFP)