Adieu coloration, quand le cheveu blanc s'affiche
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Le cheveu blanc se révèle: de plus en plus de femmes témoignent de leur choix d'arrêter les colorations et d'assumer leur chevelure grise, bousculant les conventions esthétiques traditionnelles basées sur le culte de la jeunesse.
Journaliste de mode et écrivain, Sophie Fontanel a décidé il y a deux ans d'arrêter les teintures pour laisser pousser ses cheveux blancs. Une expérience dont elle a partagé toutes les étapes avec ses 119.000 abonnés sur Instagram et qu'elle relate dans un livre, "Une apparition" (Robert Laffont) qui sort le 17 août.
Cette tendance à assumer ses cheveux blancs, venue des Etats-Unis, s'est popularisée depuis quelques années: des femmes, trentenaires, quadra et plus, s'expriment sur des forums et sites tels "Revolution Gray", motivées pour beaucoup par la lassitude des colorations répétées et la crainte des teintures chimiques. Chez Sophie Fontanel, habituée des Fashion Weeks, la démarche était avant tout une question esthétique. "Je n'ai pas du tout fait cela pour être naturelle. Je l'ai fait parce que j'ai eu l'intuition que c'était plus beau que d'être teinte", explique la journaliste de 54 ans à l'AFP.
Revendiquant le côté "très prosélyte" de sa démarche, elle en a fait une expérience interactive, en postant régulièrement des photos d'elle aux différents stades de la pousse de ses cheveux blancs.
Démonter les a priori'
"En voyant mes propres résistances à me laisser les cheveux blancs, je me suis demandée ce que cela voulait dire. Je me suis dit qu'il serait intéressant de mettre ça sur la place publique, de voir les réactions", raconte-t-elle. "Je savais que ça susciterait de l'intérêt, mais pas à ce point! Maintenant je reçois énormément de messages privés qui me disent regardez, moi aussi je le fais. Je vois bien que j'ai encouragé des femmes". "Cela m'a demandé une certaine audace", dit-elle. "Je pense que les femmes, parce qu'elles sont pétries de conventions, se refusent à des beautés satellites".
La journaliste, qui a travaillé quinze ans pour le magazine Elle et tient aujourd'hui une chronique mode à L'Obs, a voulu "démonter tous les a priori" sur les cheveux blancs: qu'ils seraient trop épais, qu'il faudrait les avoir courts, qu'ils ne ne plairaient pas aux hommes... Dans la mode déjà, certaines figures avaient ouvert la voie: l'Américaine Kristen McMenamy, mannequin des années 1990 connue pour son style androgyne, a arrêté les colorations à l'approche de la quarantaine. Silhouette familière des Fashion Weeks, la journaliste du Vogue britannique Sarah Harris, une trentenaire, affiche elle aussi une longue chevelure argentée.
Choix esthétique parmi d'autres
La couleur a aussi séduit des stars comme Lady Gaga ou Rihanna, qui se sont essayées à des teintures grises. Les coiffeurs surfent sur cette tendance, proposant des solutions pour accompagner la période de transition et atténuer l'effet bicolore, explique André Delahaigue, directeur artistique des salons Maniatis.
Et les produits anti-jaunissement voient leurs ventes augmenter: +28,48 pour cent chez Franck Provost depuis 2016 et +17,85 pour cent chez Jean Louis David. "Pour les femmes les cheveux blancs ont longtemps été décriés d'un point de vue esthétique, ou associés uniquement à la décadence physique", souligne le sociologue Frédéric Godart. "Avec l'allongement de la durée de la vie, et l'affirmation progressive des femmes dans toutes sortes de professions et dans les médias, les choses changent: un symbole de vieillesse devient un choix esthétique parmi d'autres".
Même si les cheveux blancs des femmes ne sont pas encore valorisés comme ceux des hommes qui "sont souvent perçus positivement, par exemple comme un symbole de sagesse". Et la pression sociale reste souvent forte: l'écrivain Tatiana de Rosnay racontait à Paris Match en 2016 avoir dû essuyer "mille sarcasmes" au moment où elle a arrêté de se teindre les cheveux. "Quand ils vous voient avec les cheveux blancs, vos enfants s'inquiètent", témoignait récemment la chanteuse Lio dans L'Obs. "Moi pourtant je n'ai pas peur de vieillir, et de le dire". (AFP)
Photo: Thomas Samson / AFP