Sur une scène parisienne, les amours troubles pendant la Seconde Guerre mondiale de Coco Chanel
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La grande prêtresse de la mode en héroïne amoureuse pendant l'Occupation, lors de la Seconde Guerre mondiale: pour la première fois, la liaison de Gabrielle Chanel avec un officier nazi est à l'affiche d'un théâtre parisien.
Coco Chanel, "envoûtée par le baron Hans Günther von Dincklage et éloignée de son atelier de couture, offre un formidable portrait de femme, aussi bouleversante qu'insupportable, tout en questionnant la place de l'amour dans sa vie et en racontant une période trouble", explique Anne Bourgeois, metteuse en scène de "Mademoiselle Chanel en hiver".
Dans cette création du dramaturge Thierry Lassalle, Gabrielle Chanel retrouve à Lausanne son grand ami l'écrivain Paul Morand, mais aussi le baron dont elle est tombée amoureuse quelques années plus tôt à Paris alors qu'il était attaché de l'ambassade d'Allemagne.
Au Théâtre de Passy, la pièce reconstitue à travers des dialogues ciselés, tour à tour drôles et féroces, les conversations entre Chanel et Dincklage pendant l'hiver 46, dans un palace suisse où ils se sont réfugiés pendant l'Occupation.
En 1974, Edmonde Charles-Roux avait révélé ce pan obscur de la vie de Chanel dans son livre "L'Irrégulière, ou mon itinéraire Chanel". En 2011, le journaliste américain Hal Vaughan est allé plus loin dans les révélations avec "Au lit avec l'ennemi, la guerre secrète de Coco Chanel", en indiquant qu'elle était l'agent F-7124 avec le nom de code Westminster, du nom de son ancien amant et ami le duc de Westminster.
Avec Caroline Silhol dans le rôle principal, cette création est inspirée en partie de la biographie que Paul Morand a consacré à la styliste ("L'Allure de Chanel"). Sur scène, l'écrivain est incarné par le journaliste et comédien Christophe Barbier.
"J'ai profité du confinement pour me plonger dans la vie de Gabrielle Chanel en relisant la biographie publiée par Paul Morand mais qui n'évoque pas cette liaison. En lisant d'autres ouvrages de référence sur la vie de Coco, j'ai reconstitué cette période controversée", raconte l'auteur de la pièce à l'AFP.
"On a toujours écrit l'histoire du côté des vainqueurs et je trouvais très intéressant aussi d'avoir l'autre facette. Tout en n'étant pas d'accord avec ce que certaines personnes ont fait à cette époque, j'ai découvert une grande amoureuse", confie pour sa part Caroline Silhol, révélée par François Truffaut dans "Vivement Dimanche".
"Gabrielle Chanel aura été aussi une grande résiliente. Même bannie, elle s'est relevée de tout", considère la comédienne qui livre une composition saisissante de la styliste et dit avoir "eu un coup de coeur pour l'écriture et le personnage".
Le rôle de Coco Chanel lors de la Seconde Guerre mondiale reste très controversé car soupçonné de collaboration avec les Allemands. Durant son exil en Suisse, elle a fait intervenir les autorités nazies pour récupérer la propriété de ses parfums, cédée avant-guerre à des industriels juifs, les frères Wertheimer. En vain.
Gabrielle Chanel tente par la suite de négocier une paix séparée entre l'Allemagne et la Grande-Bretagne. Une opération abracadabrante, baptisée "Modelhut" (Chapeau de couture) qui la conduira deux fois à Berlin. A la Libération, Coco Chanel sera arrêtée mais relâchée quelques heures plus tard, sur une intervention de Churchill. Le baron Hans Günther von Dincklage, est lui mort en 1974, aux Baléares, à l'âge de 78 ans.(AFP)