Richemont, le roi de la joaillerie, qui attise les convoitises de Bernard Arnault
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Le géant du luxe Richemont, propriétaire de la maison Cartier, est régulièrement au coeur de rumeurs que son fondateur, le milliardaire Sud-Africain Johann Rupert, 74 ans, s'empresse de démentir, proclamant haut et fort sa volonté de rester indépendant.
La récente entrée dans son capital de Bernard Arnault, le président de LVMH, le numéro un mondial du secteur, a donc soulevé de nombreuses questions, pour l'instant sans réponses. Mais pourquoi ce groupe suisse suscite-t-il tant de convoitises? Réponse en chiffres.
Roi des joaillers
Basé à Genève, Richemont a réalisé un chiffre d'affaires de 20,6 milliards d'euros durant son exercice 2023/2024 décalé (clos fin mars) et est classé tantôt comme le numéro deux mondial du secteur, tantôt comme le numéro trois, au coude-à-coude avec le français Kering (propriétaire notamment de Gucci), selon l'évolution de leurs ventes annuelles.
La joaillerie contribue à 69% de son chiffre d'affaires grâce à Cartier, sa marque phare surnommée le "joaillier des rois et roi des joailliers" pour ses liens avec les têtes couronnées. Pour son mariage, Kate Middleton, la princesse de Galles, portait un diadème de Cartier que lui avait prêté la Reine Elisabeth II.
Le groupe ne divulgue pas ses ventes par marques, mais selon les estimations de Jean-Philippe Bertschy, analyste chez Vontobel, le chiffre d'affaires annuel de Cartier avoisinait 11 milliards d'euros durant l'exercice écoulé.
Richemont est également propriétaire de la marque française Van Cleef & Arpels, qui a connu un développement "exceptionnel" ces dernières années, souligne M. Bertschy.
Cet ancrage dans la joaillerie, considérée comme son point fort, lui confère une plus grande résilience que la mode ou la maroquinerie en cas de ralentissement économique, la haute joaillerie s'adressant à une clientèle nettement moins sensible aux aléas de la conjoncture.
Le groupe s'y est encore renforcé en s'offrant en 2019 la maison italienne Buccellati pour 230 millions d'euros. En mai 2024, il a annoncé le rachat de l'italien Vhernier, sans dévoiler le montant offert.
Horlogerie, mode et stylos
Richemont est propriétaire de huit marques de montres, qui contribuent à 18,2% de son chiffre d'affaires. Son portefeuille englobe notamment Baume & Mercier, IWC Schaffhausen, Panerai, Piaget et Roger Dubuis.
Selon les estimations de la banque américaine Morgan Stanley et du cabinet suisse LuxeConult, les ventes de sa plus grande marque horlogère, Vacheron Constantin, ont atteint 1,09 milliard de francs suisses (1,12 milliard d'euros) en 2023, se hissant pour la première fois de son histoire dans le club des huit marques suisses dont le chiffre d'affaires dépasse le milliard de francs.
En 1997, sa marque de stylos Montblanc s'était également diversifiée dans les montres. Elle reste cependant rangée dans la division, qui regroupe une dizaine de marques, accessoires, mode et autres.
Cette division est celle où se concentrent les point faibles du groupe, selon de nombreux analystes, avec "plusieurs marques qui sous-performent depuis des années", note Jean-Philippe Bertschy.
En 2018, Richemont y a notamment revendu les sacs à main Lancel, cédés à l'italien Piquadro. Cette division ne représente toutefois que 12,6% de son chiffre d'affaires annuel.
10% des parts, 51% des droits de votes
Richemont a été créé en 1988 par Johann Rupert pour regrouper les actifs internationaux du groupe sud-africain Rembrandt, dont des activités dans le tabac avec lesquelles sont père Anton avait fait fortune.
Le groupe s'est progressivement séparé du tabac - mais aussi d'une participation dans Canal+, cédée en 1999 au français Vivendi - pour se recentrer sur le luxe à coup d'acquisitions, dont celle en 2000 de LMH, que convoitait également le groupe de Bernard Arnault.
Le milliardaire sud-africain qui a débuté sa carrière chez la banque d'affaires Lazard à New York détient 10% du capital mais 51% des droits de vote par le biais d'une structure duale, avec des actions A et B.
Cette structure offre une protection contre les offres non-sollicités, mais l'a aussi aidé en 2022 à contrecarrer la tentative d'un fonds activiste d'imposer des changements au conseil d'administration.
Cette protection ne fait qu'amplifier les questions quant aux intentions de Bernard Arnault. Fin juin, l'agence Bloomberg a dévoilé qu'il avait pris une participation dans Richemont, dont le montant n'est pour l'instant pas connu.(AFP)