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Nathalie Fargeon (émoi émoi) : « toute notre équipe s’intéresse à la parentalité »

Par Herve Dewintre

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Business|Interview
Courtesy of émoi émoi

Fondé en 2010 par Nathalie Fargeon et Adèle Bounine, le label émoi émoi (qu’il faut écrire sans majuscules) a connu plusieurs vies, passant du statut de site spécialisé pour les futures mamans à celui d’une marque à part entière, spécialisée dans la famille. Une transformation réussie, sous le signe de l’éthique et de la bienveillance. Interview.

FashionUnited : En 13 années d’existence, émoi émoi a connu plusieurs vies. Comment définieriez vous aujourd’hui l’identité de la marque ?

Nathalie Fargeon : émoi émoi, c'est la marque de l'amour. De l'amour, on en met partout : dans nos vêtements bien sûr (matières toutes douces, naturelles ou recyclées pour l'amour de la Planète, pièces coordonnées à porter avec ceux qu'on aime), mais aussi dans la relation avec nos clients qu'on aime gâter et surprendre, dans les histoires qu'on raconte sur notre magazine, et dans des relations bienveillantes et respectueuses avec nos partenaires et notre équipe.

Vous venez d’HEC et vous savez élaborer un business plan. Qu’est-ce qui vous a incité à vous focaliser sur un marché de niche (l’habillement de la femme enceinte) ?

Nous avons démarré l'aventure émoi émoi en vendant des vêtements pour les futures mamans en 2010, parce qu'Internet est une bonne réponse aux besoins qui trouvent peu d’écho dans la distribution physique. Quand on n'a pas de boutique de vêtements de grossesse en bas de chez soi, on tape dans Google « vêtements de grossesse » pour rechercher. On dénichait des créateurs européens impossibles à trouver en France en magasin et on vendait notre sélection sur notre e-shop. Par ailleurs, les futures mamans sont une population très présente sur internet (pour se renseigner sur leur grossesse, mais aussi éviter de se déplacer dans les magasins) et notre site a connu un joli succès. En 2014, on a décidé d'aller plus loin et de lancer notre propre ligne de vêtements et accessoires, et de la consacrer à l'identité familiale et à la célébration des liens avec ceux qu'on aime. On a commencé avec les premiers sweats à message « maman poule » et « maman cool » fabriqués en Europe. Aujourd'hui notre e-shop émoi émoi commercialise exclusivement nos propres créations, pour femme, homme et enfant, dès la naissance et sans limite d'âge.

Quelles sont vos perspectives de développement et de diversification ?

En janvier 2023 nous avons lancé notre premier jean pour femmes « le jean qui vous aime » : un jean fabriqué au Portugal, en coton bio, avec une coupe spécialement travaillée pour se sentir bien dans son corps, malgré les variations de poids et de silhouette qui arrivent souvent quand on a des enfants. Même si notre spécialité reste les hauts pour toute la famille (sweats, t-shirts, hoodies...), nous diversifions aujourd'hui notre offre avec quelques « bas » : jupes, pantalons et aujourd'hui le jean, pour proposer à notre clientèle des silhouettes complètes, fabriquées avec éthique, qui conjuguent style et confort. Je précise que ces jeans - d'abord lancés en précommande - ont rencontré un grand succès notamment parmi nos clientes fidèles.

Qu’est-ce qui a motivé votre récent repositionnement mode ?

émoi émoi est connu sur le segment des cadeaux (cadeaux de naissance, noël, fête des mères...), nous avons voulu nous inscrire davantage dans l'habillement. Adèle et moi [les cofondatrices, ndlr] avons depuis toujours l'envie de créer une marque durable, qui existera encore dans des dizaines d'années. Pour cela, nous avons développé un vestiaire de qualité, qui peut se porter et se reporter dans un quotidien familial mouvementé, des vêtements qui peuvent se transmettre d'un enfant à un autre, peut-être un jour de génération en génération ! Nous avons aussi à cœur de changer la manière de faire des vêtements pour une mode plus respectueuse de la Planète. Nous produisons au Portugal 90 pour cent de notre offre de vêtements, en matières naturelles ou recyclées. Le défi de la mode durable nous passionne, nous avons d'ailleurs rejoint le mouvement « En mode climat » qui fédère plus de 500 acteurs de la mode éthique et qui œuvre pour changer les lois pour que l'industrie textile réduise ses émissions de CO2.

Comment une marque de taille humaine fait face à la hausse des couts qui s’emballe depuis quelques mois ?

Ce n'est clairement pas facile, la hausse des coûts de production que nous connaissons depuis début 2022 est inédite pour nous, on n'avait jamais vu ça depuis nos débuts dans le textile ! Une des clés est d'opérer une politique de prix juste et la plus transparente possible. Certains coûts de fabrication ont augmenté de plus de 30 pour cent en un an, nous révisons nos prix de vente tous les 6 mois, en communiquant sur ces hausses à nos clients (par newsletter, dialogue avec notre service-client ou via les réseaux sociaux). Ces hausses de prix ne sont acceptables pour la clientèle qu'avec un excellent rapport qualité-prix : nous travaillons beaucoup sur la qualité (matières, détails, finitions) et sur l'image et la désirabilité : les photos et vidéos doivent donner envie ! Nous travaillons aussi sur les achats et le stock : avec la baisse de la marge, et la hausse des taux, il faut diminuer nos stocks pour libérer de la trésorerie. Nous optimisons nos achats (réduction du nombre de nouvelles références) pour acheter de manière plus fine. Nous avons organisé des braderies et des opérations de déstockage sur des sites partenaires comme Choose ou The Bradery pour écouler les invendus des saisons précédentes.

Face aux géants de la mode et du textile, comment gère-t-on son budget communication et marketing ?

Notre budget communication est essentiellement concentré sur de la publicité en ligne. Nous gérons ce budget au jour le jour. Même si nous avons un budget marketing annuel précis, nous sommes très agiles pour le pilotage de ce budget. Selon la saison, les collections, mais aussi la météo et le moral ambiant, les coûts d'acquisition peuvent varier du simple au double. Nous nous adaptons pour augmenter et diminuer la publicité en ligne selon les performances. Le contenu des publicités compte beaucoup dans les résultats : il faut un contenu beau et surprenant. C'est un enjeu important de notre travail que le storytelling autour de nos collections. Mettre en image et en mots nos produits, pour raconter des moments de vie.

Les collaborations entrent dans cette stratégie de communication ?

Les collaborations et partenariats sont aussi utiles pour se faire connaître : à l'automne 2022 notre collection en collaboration avec Bocage nous a permis d'être présents sur une soixantaine de magasins Bocage en vitrine, c'est une visibilité précieuse !

émoi émoi a-t-elle vocation à rester une marque totalement digitale ?

95 pour cent de nos ventes sont réalisées sur notre site e-commerce. Depuis 2015, nous avons chaque année des pop-up stores et/ou corners dans les grands magasins qui représentent 5 pour cent de notre chiffre d'affaires. Il est essentiel d'être omnicanal : nos clients ont envie de toucher et de voir nos produits, de rentrer dans notre univers. Mais dans le contexte économique actuel, nous n'avons pas les fonds propres nécessaires pour ouvrir des points de vente physiques permanents. Nous avons d'autres projets pour montrer nos produits et aller à la rencontre de notre communauté : des événements comme l'essayage du jean au bureau, des projets de corner et pop-up stores, et le lancement du BtoB courant 2023, pour proposer émoi émoi dans des boutiques multimarques. 

Au-delà du business, on sent un vrai engagement pour la parentalité. Pensez-vous qu’emoi emoi aurait pu être fondé par des hommes ? Ou que ceux-ci auraient pu avoir l’idée de proposer des sweats d’allaitement par exemple ?

Je ne sais pas si émoi émoi aurait pu être fondé par des hommes, mais je sais que notre marque est le fruit d'un travail collectif. Toute notre équipe s'intéresse à la parentalité, et plus largement à l'amour et aux liens qui se tissent dans une famille ou une communauté. Chaque femme qui travaille chez nous met du sien dans son travail et colore la marque de manière unique en proposant des idées de produits, d'articles sur notre magazine, des collaborations ou des imprimés. C'est ce qui fait le côté unique d'émoi émoi aujourd'hui : un travail de création sincère et passionné par un collectif de femmes engagées et à l'écoute de la communauté.

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