LVMH et les vestes en jean à 700 euros de Rihanna: chronique d'un flop
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LVMH n’a pas réussi à marquer l’essai avec Fenty, marque de mode globale codétenue par la mégastar Rihanna et le groupe de luxe français. Certaines activités vont perdurer (notamment les lignes beauté, les lunettes et la lingerie) mais la mode et l’accessoire vont passer à la trappe. Officiellement il s’agit d’une halte. Cela signifie t’il que la mode Fenty attend de meilleurs jours pour revenir sur le devant de la scène ? Rien n’est moins sûr : le groupe de Bernard Arnault a d’immenses qualités, notamment celles qui concernent la mise en valeur de griffes patrimoniales, mais il ne possède pas celui de savoir créer une marque ex-nihilo.
L’échec de Christian Lacroix, seule marque du groupe à avoir été fondée à partir de zéro, le prouve. En 1987, Bernard Arnault, cédant aux conseils de Jean-Jacques Picart, avait lourdement investi dans une marque de mode globale s’articulant entièrement autour de l’immense talent du créateur arlésien. Mais ni les défilés fastueux pourtant fiévreusement adoubés par les rédactrices de mode, ni les puissantes campagnes de promotion, ni les boutiques luxueuses mises à disposition de la marque n’ont jamais convaincu les clientes de céder aux charmes des propositions chamarrées de Lacroix. Le 25 janvier 2005 : LVMH cédait entièrement la société Christian Lacroix au groupe américain Falic.
En ce qui concerne Fenty, LVMH n’aura pas attendu 17 ans pour se rendre compte de son faux départ. En deux ans, la marque de Rihanna a perdu beaucoup d’argent et l’immense majorité de ses cadres a quitté le navire depuis plusieurs mois. Sur le papier, les bases semblaient pourtant solides. Les premières collaborations entre Rihanna et LVMH avaient rencontré un vif succès : il y avait tout d’abord la ligne de lunettes de soleil créée pour la Maison Dior dont la chanteuse était par ailleurs ambassadrice. Puis, plus significatif encore, le lancement de la société de cosmétiques Fenty Beauté de Rihanna : un carton, grâce notamment à ses palettes inclusives, proposant 40 teintes différentes. L’immense popularité de la star (88 millions de followers sur Instagram) promettait d’étendre ces premiers succès vers d’autres activités plus lucratives encore : c'est-à dire le prêt-à-porter et les accessoires.
Mauvais positionnement de la marque
Sauf que l’échec est immédiat. Lancée en grande pompe en mai 2019, la mode Fenty n’a jamais décollé malgré les 30 millions d’investissements consentis par Bernard Arnault. Le problème ne résidait pas dans le style des collections, mais dans leur prix. Rétrospectivement, les spécialistes s’accordent pour indiquer qu’il s’agissait d’un très mauvais positionnement : le prix d’une pièce en faux cuir tourne autour de 1 000 euros. La marque revoit alors sa copie en proposant des éléments plus sportswear. Mais ni les vestes en jean à 700 euros, ni les vestes de survêtement en jersey à 420 euros ne rencontrent un engouement justifiant de pouvoir continuer à combler les pertes. Pour la même somme, les aficionados de prêt-à-porter de luxe préfèrent se tourner vers des valeurs sûres. Le gigantesque public de Rihanna était d’accord pour s’offrir une part du rêve proposé par la chanteuse à partir du moment où celui-ci avait un juste prix. La mode de Rihanna redémarrera-t-elle un jour chez LVMH ? Cela semble peu probable : tout d’abord, parce que LVMH n’aimera pas baisser ses prix (le groupe n’a pas d’histoire commune avec le milieu de gamme), et ensuite parce qu’il est bien difficile – et très coûteux - de réamorcer ce que l’on a abandonné, même lorsqu’on maîtrise l’art délicat de réveiller les belles endormies.
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Crédit photo : LVMH