Les anciens patrons de Maje et Sandro entrent dans Le slip français

Il y a cinq ans, la naissance de la marque française Le Slip Français a fait sourire beaucoup de monde. Pas franchement un sourire de moquerie mais enfin, l'affaire était entendue: cette start up sympathique, née de l'imagination de son fondateur Guillaume Gibault, ne pouvait pas survivre plus de quelques mois avant que la plaisanterie ne soit definitivement close. Le ton a changé aujourd'hui. Désormais la marque est prise au sérieux: surtout depuis que le fonds d'investissements Experienced Capital Partners vient d'entrer au capital ( à hauteur de 36,5 pour cent) avec un apport de huit millions d'euros.

La somme peut impressionner au premier abord mais tous les spécialistes savent que c'est le montant minimum à mettre sur le tapis pour consolider une activité et pour passer un cap à l'international. Non, ce qui impressionne surtout, ce sont les profils des investisseurs: en effet, le fond d'investissements Experienced Capital Partners a été fondé par Frédéric Biousse, Elie Jouby et Emmanuel Pradère. Ces noms inconnus du grand public font autorité sur la place parisienne puisqu'il s'agit des anciens patrons de Sandro et de Maje.

Ces trois entrepreneurs à qui on doit également le succès de la marque Le Comptoir des Cotonniers veulent miser désormais avec leur société sur les pépites de demain. Ils misent sur le luxe abordable, dans la mode, les cosmétiques, l'alimentation et le voyage. Ils cherchent avant tout des entreprises réalisant un chiffre d'affaire inférieur à 20 millions d'euros, trop petites pour intéresser les grands fonds d'investissement. Leur première opération a été Balibaris lancée il y a cinq ans par Paul Szczerba. *« Pour que nous entrions au capital, il faut un produit qualitatif, un positionnement clair, et un bon niveau de prix.* *Avoir une expérience retail réussie, avec plusieurs points de vente ou un site internet est aussi incontournable, ainsi qu'un manager avec la tête sur les épaules* " détaillait Frédéric Biousse aux Echos en février dernier.

Le choix payant du made in France.

On peut rétrospectivement comprendre ce qui a séduit les anciens patrons de Sandro et de Maje, deux marques splendides, fer de lance du luxe accessible français, aujourd'hui passées sous pavillon chinois. Le positionnement du slip Français est remarquable: une marque forte, identifiable, un vêtement facile, léger, pratique à expédier, avec un faible taux de retour. Guillaume Gibault était en effet persuadé des le départ qu'il fallait miser sur l'e-commerce : un canal de distribution "qui allait tout révolutionner". Résultat, le stock est minime. La marque a produit 250000 pièces cette année.

Autre pari gagnant: le choix du made in France. Pour sa qualité bien sur mais pas que. Certes le made in France est plus cher, mais paradoxalement il permet à une PME d'être compétitive en se passant d'intermédiaires. Une option bien comprise par les grandes marques comme Repetto par exemple, mais non réellement perçue à sa juste mesure par les acteurs de la consommation courante. Jusqu'à maintenant en tout cas.

Désormais, le Slip Français, c'est 40 collaborateurs, et 40 temps plein dans une dizaine d'usines. Le chiffre d'affaires devrait atteindre 8 millions d'euros cette année. Ce chiffre, il faut le comparer à celui des années précédentes: 40000 euros en 2011, 1,5 millions d'euros en 2014, 3,6 millions en 2015. La marque, contrairement à ce que laisse présager son nom, ne produit pas que des slips mais aussi des sous-vêtements divers, des tee-shirts, des pulls, des maillots de bain, des charentaises, des boules de pétanque. 80 pour cent des ventes passent par internet. La marque a inauguré trois boutiques à Paris. La levée de fonds devrait lui permettre d'ouvrir de nouvelles boutiques en Province, et pourquoi pas à l'étranger. Pas de doute, la start-up des débuts est désormais une entreprise florissante, prête à explorer de nouveaux horizons.

Crédit photo: leslipfrancais.fr