L'Afrique du Sud peine à raccommoder son secteur textile en crise
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Pendant des décennies, il a porté à bout de bras l'économie de nombreuses villes du pays. Étranglé par la concurrence à bas prix venue surtout de Chine, le secteur textile sud-africain peine à redémarrer, malgré le soutien des pouvoirs publics.
A Maitland, dans la banlieue du Cap (sud-ouest), le petit atelier résonne du cliquetis métallique des machines à coudre. Voûtés au-dessus de leur ouvrage, ses employés s'activent à fournir la commande quotidienne d'une chaîne locale de magasins. Avec 253 salariés, l'entreprise Kinross est l'une des multiples bénéficiaires du plan de soutien financier, sous forme de subventions ou de prêts à taux préférentiels, lancé par le gouvernement pour tenter de sauver le secteur.
Mais à en croire son patron, ses effets tardent à se faire sentir. "En ce moment, notre industrie stagne", constate Christopher Kinross. "Ces dernières années, nous avons traversé des moments particulièrement difficiles", ajoute-t-il, "et nous avons cédé du terrain sur nos concurrents du monde entier". Dans la confection depuis plus de cinquante ans, M. Kinross reconnaît que l'appui de l'Etat, ces quatre dernières années, lui a apporté "un peu de stabilité". Mais beaucoup reste à faire pour restaurer la compétitivité de l'industrie locale et lui permettre de recréer une partie de ses emplois perdus. Plus de 160.000 en quinze ans, selon les statistiques du secteur, les deux-tiers de sa main d'oeuvre totale. "La volonté (des pouvoirs publics) d'aider l'industrie ne fait aucun doute (...) mais nos problèmes vont bien au-delà de la concurrence des importations", juge M. Kinross.
'On n'y arrive pas'
Selon lui, l'un des principaux freins au redémarrage du secteur reste la taxe sur les importations de matière première étrangère. "Nous versons une taxe de 22% sur les tissus importés (...) Si elle était supprimée, notre activité pourrait progresser de façon spectaculaire", insiste le patron, "l'industrie a les moyens de créer de l'emploi mais pour l'heure, elle n'y arrive pas". Des négociations ont bien été ouvertes il y a plusieurs années entre les professionnels et le gouvernement autour de cette taxe mais elles n'ont jusque-là pas abouti.
Le secteur textile contribue pour 3,3% au produit intérieur brut sud-africain mais dépend largement de la demande intérieure. Pour l'heure, les investisseurs étrangers dans l'industrie du vêtement d'Afrique australe préfèrent largement le Lesotho, le Swaziland ou Madagascar à l'Afrique du Sud. Et pour cause. "Nos salaires sont relativement élevés comparés à ceux d'autres pays producteurs", regrette M. Kinross, qui précise que 45% de son chiffre d'affaires est absorbé par le coût du travail. Le gouvernement sud-africain a posé comme condition à son soutien financier aux entreprises du secteur qu'elles versent à leurs employés un salaire minimum. Depuis six ans que ce programme d'aide a été mis en place, une enveloppe de 5,3 milliards de rands (330 millions d'euros) a été débloquée à 505 entreprises de confection d'Afrique du Sud.
Fermetures
"Tout ce qui est nécessaire à la protection de l'industrie doit être fait", a récemment promis le ministre du Commerce, Rob Davies, "mais cela doit être fait dans l'intérêt du développement de l'industrie et pour améliorer la situation des fournisseurs locaux". L'arrivée sur le marché sud-africain de géants internationaux tels que H&M et Zara a ouvert un nouveau front dans la bataille. Ces groupes, qui fabriquent leur production à des prix inférieurs à ceux pratiqués en Afrique du Sud, ont pris ces dernières années de larges parts de marché à l'industrie locale. Le mois dernier, le syndicat des travailleurs du textile et de l'habillement (SACTWU) a manifesté devant les centres commerciaux du pays pour exiger des commerçants qu'ils privilégient les produits fabriqués localement.
"Ces enseignes étrangères commandent peu en Afrique du Sud, ce qui provoque des fermetures d'usines", a déploré l'organisation. Malgré toutes ces difficultés, le textile sud-africain a amorcé ces dernières années une très timide reprise. "Depuis 2011, le nombre de suppressions d'emplois s'est ralenti et ces dix-huit derniers mois, les créations ont même commencé à repartir", observe Simon Appel, un analyste du secteur. Mais, avertit-il, le redémarrage de l'industrie ne se confirmera que si elle parvient à se refaire une place solide sur le marché international. "Notre industrie a toujours du mal à augmenter ses exportations", souligne M. Appel. Mais les plus optimistes veulent croire à une reprise. Cette année, le groupe tchèque Pegas Nonwoven a annoncé la construction d'usine au Cap pour un montant d'un milliard de rands (62 millions d'euros). Le plus important investissement de toute l'histoire du textile sud-africain. (AFP)
Photo: birgitH / pixelio.de