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Gucci ne soldera plus les produits créés par Alessandro Michele

Par Herve Dewintre

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La semaine dernière, le groupe Kering a présenté son chiffre d’affaires du troisième trimestre, et a rassuré au passage ceux qui voyaient déjà les géants du luxe s’enfonçant dans les méandres de la crise. Ce chiffre d’affaires est excellent : en hausse de 10,5 pour cent, soit 3,18 milliards d’euros. Un homme peut pour une large part s’attribuer les mérites de ce succès: il s’agit de Marco Bizzari, le nouveau PDG de Gucci.

C’est l’homme fort du groupe. Et cela ne date pas d’hier. Il était déjà l’artisan du triomphe Bottega Veneta qui en douze ans, sous sa présidence, est passé d’un chiffre d’affaire de 30 millions d’euros à celui, vertigineux, d' un milliard ! Encore auparavant, il avait fait des prodiges à la tête de Stella McCartney ce qui lui valut d’être propulsé à la tête du pole luxe-maroquinerie de la multinationale de M.Pinault. Quel est son secret?

Marco Bizzari, « Bizza » pour ses amis, a 53 ans. Italien, né à Emilie-Romagne, c’est un géant d’1 mètre 90, père de trois enfants, grand lecteur de la revue de géopolitique italienne Limes. On dit volontiers de lui qu’il conjugue la robustesse d’un sportif aguerri (il est ceinture noire de karaté, amateur de Taekwondo) avec cette aptitude à saisir les nuances propre aux grands érudits (il se plonge volontiers dans de volumineux romans). Surtout, Il est réputé pour sa finesse de management.

Ce que les autres PDG lui envient, c’est sa capacité à entrer en totale adéquation avec les visions des directeurs artistiques. Son long passage chez Bottega Veneta a prouvé qu’il savait impulser sa vision sur l’ensemble de la chaine. Avec Tomas Maier, nommé directeur artistique de Bottega Veneta en 2001, il sut en effet vivifier la maison italienne qui s’était endormie sur ses lauriers, et lui faire retrouver son lustre des origines.

Comment? Grace à une capacité hors norme à mener une multitude de projets ambitieux sur tous les fronts. Chez Bottega, il eut le courage de renoncer aux logos (une décision loin d’être évidente dans les années 90), de proclamer un retour définitif à l’artisanat (ce qui fut loin d’être simple également car les petites mains qualifiées ne courent pas les rues à Vicenze), d’engager la transformation d’une gigantesque propriété agricole en nouvel atelier pour les salariés, de créer des coopératives ouvrières spécialisées en maroquinerie, le tout en restant dans la région de Vénétie. Sans parler de l’aménagement de 200 boutiques, dont celle, éblouissante, de Milan, située via Sant’Andrea.

Les résultats furent à la hauteur puisqu’il réussit à remettre au premier plan Bottega Veneta au centre du paysage ultra concurrentiel des marques de maroquinerie très haut de gamme. Marques, qui pour la plupart, sont toutes les mêmes depuis les années 50. Le tout, sans jamais changer de cap, et sans jamais essuyer un refus de M. Pinault.

Les ventes ont progressé de 17 pour cent au deuxième trimestre

Au final, Marco Bizzari applique chez Gucci les recettes qui ont fait leurs preuves chez Bottega, que ce soit en terme d’images (aussi bien sur le print que le numérique) qu’en ce qui concerne les investissements menés sur les structures de production. Les résultats prouvent la pertinence de cette stratégie. Il n’a échappé à personne qu’une Guccimania s’est emparée de la planète mode depuis plusieurs mois. Le fruit d’un virage stylistique total mené de concert avec le nouveau directeur artistique Alessandro Michele. Les sacs en toiles GG rebrodés de fleurs, de serpents ou d’abeilles s’arrachent. Les mocassins, n’en parlons pas. Le prêt à porter, féminin et masculin se porte bien lui aussi. Et ce n’est pas simplement un succès d’image. Les ventes ont progressé de 17 pour cent au deuxième trimestre, à 1,08 milliards d’euros. Soit sept points de plus que les attentes des analystes. La marque représente 60 pour cent du bénéfice d’exploitation du groupe Kering. Pour Jean-Marc Duplaix, directeur financier du groupe, on peut bien parler d’un triomphe : « « Gucci réalise sans doute l’une des meilleures performances du secteur avec sa première croissance à deux chiffres enregistrée depuis le deuxième trimestre 2012 ». C’est d’autant plus impressionnant que l’ensemble du secteur du luxe est à la peine.

Effet de mode passager ? Le PDG s’en défend. Son obsession n’est pas de faire un coup mais d’inscrire ce succès dans la pérennité. Et pour montrer que Gucci n’est pas une marque de mode mais bien une marque de luxe prestigieuse, il a décidé de ne plus solder les produits créés par son directeur artistique. Désormais, tous les invendus seront retirés des points de vente, sans passer par la case soldes. Le but bien compris étant de créer une relation de confiance sur le long terme avec les clients qui ne supportent plus de payer plein pot des produits soldés deux mois plus tard. Des recettes déjà appliquées depuis longtemps par une autre marque : Louis Vuitton.

Crédit photo: capture d’ecran Gucci.com

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