Grèves des Taxis, retombées financières des fashion week : la lettre ouverte d’Ezio Barbaro
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Le DEFI estime à 400 millions d’euros annuels minimum les retombées financières des fashion weeks, pour la ville de Paris. Ce montant englobe la multitude d’événements liés à la mode - défilés, salons professionnels – et tous les secteurs - hôtellerie, restauration, transports, sociétés de production, agences - mobilisés durant ces périodes qui stimulent l’activité commerciale de la capitale.
« La place de Paris tient au mix de tous les genres : c’est une alchimie où chacun est important » s’enthousiasme un créateur venu de l’étranger. « La fashion week parisienne est le seul lieu où l’on voit tout le monde », remarque une professionnelle britannique habituée des fashion week new-yorkaises et milanaises. Cependant, cette réputation d’excellence se trouve aujourd’hui fragilisée par des problèmes de sécurité, d’organisation, d’hospitalité. Lyne Cohen Solal avait d’ailleurs consacré un large paragraphe à ces problèmes d’hospitalité dans son rapport remis début 2015 à Emmanuel Macron et Fleur Pellerin.
Sans préjuger de la légitimité de leurs revendications, il faut néanmoins reconnaître que les images envoyées par les taxis grévistes, jetant des projectiles sur la route et agressant les personnes aux alentours des aéroports, n’ont pas forcement exalté l’hospitalité parisienne aux yeux des nombreux professionnels venus des quatre coins du monde pour assister aux collections homme et aux pré-collections femmes présentées en janvier dernier à Paris.
C’est dans ce contexte qu’Ezio Barbaro, l’éditeur réputé de l’indispensable Modem - guide recensant tous les showrooms de la capitale et qui sert de bible à chaque professionnel durant les fashion weeks - a adressé une lettre ouverte à l’attention des responsables des Associations des Taxis parisiens, mais aussi à l’attention du Ministre de l’Intérieur, du Préfet de Paris et de la Maire de Paris. Parce qu’elle synthétise les nombreuses remarques transmises par les professionnels de la mode et résume parfaitement les enjeux du secteur, nous la reproduisons ci-dessous, très légèrement raccourcie, mais intégralement respectée quant à son contenu.
« Au cours des périodes de fashion week, se détermine l’économie vitale de chaque marque »
« Au cours des semaines de la mode, dénommées « Fashion Weeks », ont lieu les présentations et les campagnes de vente des collections des créateurs de mode. Elles sont dédiées exclusivement aux professionnels de ce secteur (journalistes et acheteurs des boutiques multimarques du monde entier). Au cours de ces mêmes périodes se détermine l’économie vitale de chaque marque, de chaque entreprise et par conséquent celle des industries et ateliers de production qui en dépendent. »
« Dans le passé, à Paris, au cours de ces mêmes périodes, ce public professionnel s’était déjà confronté aux différents problèmes causés par le manque de service des taxis parisiens. Comme dans le passé, encore une fois, ce manque a causé, d’une part, une gêne majeure aux professionnels conviés à Paris (exemple : l’impossibilité de se rendre ou de revenir des aéroports parisiens), et d’autre part des dégâts «collatéraux», notamment aux showrooms qui ont subi l’annulation par les acheteurs de plusieurs rendez-vous vitaux, prévus les jours de grève des taxis. »
« De plus, Cette Fashion Week de janvier 2016 était le premier rendez-vous professionnel d’envergure internationale qui se tenait à Paris après la tragique journée du 13 novembre 2015. (…)Personne n’aurait pu imaginer que dans ce contexte fragile et après avoir déployé tant d’énergies pour *réussir à préserver intact le positionnement de la Fashion Week de Paris*, la corporation des Taxis parisiens puisse choisir cette période pour faire valoir des revendications. »
« Les images choquantes du 26 janvier 2016 relayées par les medias en France, ont été reprises aussi par les médias internationaux parce qu’il était inimaginable qu’un telle niveau d’iniquité et d’inconscience civique, puisse se produire de la part de professionnels au service du public parisien, ne serait-ce qu’en considération des problématiques liées à la violence que nous vivons aujourd’hui. Ce qui a été fait par les taxis parisiens *impliqués dans ces méfaits du 26 janvier pourrait être perçu, non seulement comme une explicite provocation envers le gouvernement de ce pays et la population de Paris, mais aussi comme une action complice de tous ceux qui ont intérêt à alimenter la peur et qui profitent d’une situation de déstabilisation et de détresse. »
« Le 26 janvier, un nombre important de professionnels présents à Paris avait peur de rejoindre l’aéroport alors qu’ils y étaient obligés. Je suis certain que les considérations que j’exprime ici pourraient être partagées par toutes les personnes qui représentent le secteur professionnel de la mode et qui ont animé cette Fashion Week, mais aussi par celles présentes à Paris à l’occasion du salon Maison & Objet dont nous sommes aussi partenaires. Ce salon a fermé ses portes le 25 janvier au soir. Cela signifie qu’une partie de ses visiteurs et exposants ont connu d’importantes difficultés pour se rendre à l’aéroport. »
« Mais en considération de rapports futurs entre les taxis parisiens et ce public professionnel, sachez que nous serions ravis de relayer vos excuses et votre engagement à ce qu’une telle situation de violence ne se reproduise plus et qu’une telle situation de manquement à votre mission de service ne se reproduise pas au cours de ces périodes de Fashion Weeks. *Cette démarche de votre part permettrait sans aucun doute de renouer un rapport de confiance et de sympathie avec un public dérouté et choqué par les événements récents mis en scène par les taxis parisiens. »