Gérald Didnik (Fête Impériale) : « Je sais quand une pièce sera un top ou un flop »
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Directeur général de la marque de prêt-à-porter féminin Fête Impériale depuis juillet dernier, Gérald Didnik enregistre des premiers résultats très satisfaisants. Interview.
Fondée en 2015 par Laura Gauthier Petit, la griffe Fête Impériale propose un vestiaire de qualité qui privilégie un sourcing de proximité, adopte les étoffes de qualité et favorise les collaborations qui s’inscrivent dans la démarche éthique de la créatrice parisienne. Cet univers finement ciselé entame une nouvelle phase de son expansion depuis six mois grâce à Gérald Didnik qui a pris les rênes de la griffe éthique. Le directeur général (qui a également fondé la société Best of Provence) connaît bien le prêt-à-porter haut de gamme puisqu’il avait contribué de maniere significative au développement international de la marque belge Essentiel. Il nous confie les principaux axes de sa stratégie.
Fashion United : Après avoir permis à Essentiel de progresser sur tous les fronts, vous avez pris les rênes de Fête Impériale. Deux marques haut de gamme. Allez-vous reproduire la même recette ?
Gérald Didnik : La marque Essentiel était déjà connue et bénéficiait d’un chiffre d’affaires conséquent à mon arrivée en 2015. Je suis satisfait des résultats obtenus avec cette griffe puisque nous avons obtenu en quatre années plus de 50 pour cent de progression, principalement avec l’ouverture de nouveaux marchés. Avec Fête Impériale, je peux tout construire avec Laura, la fondatrice et directrice artistique. Tout est à faire : c’est un vrai challenge dans lequel je m’investis depuis 6 mois maintenant, avec des résultats probants, sans pour autant suivre à la lettre des recettes préétablies. Il est vrai que je compte bien avoir les mêmes progressions. Cela devrait arriver sous peu. Je suis assez confiant.
Allez-vous modifier l’identité de Fête Impériale ? Quel est le business model de la marque ?
En aucun cas je ne modifierai l’ADN de la marque qui offre une pleine expression de la vision de Laura Gauthier Petit. Fête Impériale est une griffe sustainable qui utilise des tissus italiens ou français et qui ne fabrique rien en Asie. Nous travaillons avec des usines en France, Portugal et aussi un atelier pour femme en Tunisie, avec une vraie traçabilité des produits. Nous ne sur-fabriquons pas et préférons miser sur les réassorts. Stocker, solder, jeter et polluer : ce n’est pas pour nous. Bien évidemment, nous travaillons en étroite collaboration avec Laure pour définir des déclinaisons de produits qui permettent l’ouverture vers de nouveaux marchés.
Quels sont les axes de croissance que vous allez privilégier ? Ce développement passera-t-il notamment par l’ouverture de boutiques en nom propre ?
C’est un mix entre le wholesale et le retail physique et en ligne. Le nouveau site a été lancé le 8 février dernier et nous en sommes tous très contents. Les taux de conversion sont assez surprenants. Nous avons trois nouveaux agents et show-room multimarques qui couvrent une vaste partie du monde pour la saison automne-hiver 2023. En ce qui concerne le retail, j'en suis déjà à trois offres pour des boutiques : deux ont été refusées. C’est le jeu, mais je pense que la dernière sera acceptée et notre premier magasin devrait se situer dans le Haut Marais.
Quels sont les ingrédients de la « patte » Gerald Didnik ?
Je suis un peu sur tous les fronts et travaille beaucoup avec mes équipes ; mais ce que j’aime par-dessus tout, c’est le produit en lui-même. Je sais toujours quand ce sera un top ou un flop en voyant une pièce. Je pense également que je sais plutôt bien compter et que je ne dépense pas si je n’ai pas l’assurance d’avoir un retour sur investissement.
Quels enseignements vous inspire la récente vague de fermetures d’enseignes françaises (Camaïeu, Kookaï, San Marina etc.) ? Y a-t-il encore une place pour un prêt-à-porter de belle facture en Europe entre les géants du luxe et les titans de la fast fashion ?
Je pense qu’il y a trop de gens qui sont arrivés dans ce métier et qui investissent sans même savoir ce qu’est un produit : c’est un peu le cas des repreneurs des marques que vous citez et je crains qu’il y en ait d’autre. Vous pouvez dépenser des millions en marketing et en communication mais si vous n’avez pas le bon produit, cela ne sert à rien. Je suis réellement désolé pour les salariés de ces enseignes qui se sont retrouvés sans rien du jour au lendemain. Je constate que toutes ces marques fabriquent la quasi-totalité de leurs modèles en Asie. Or, tout cela se négocie en dollars : avec un taux de change moins favorable, depuis une année, cela a coûté 10 à 15 pour cent plus cher sans parler des prix du fret qui sont devenus fous après le Covid. Donc oui, je pense sincèrement qu’il y a une place entre le luxe qui se porte admirablement bien en effet et la fast fashion qui copie principalement : le client final revient plus à de vraies valeurs qui sont du made in Europe avec une durabilité́ du produit et un vrai savoir-faire.