Du Brexit à l'‘Amazonisation’
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Au cours des neuf premiers mois de l'exercice 2016, les retailers de vêtements en Europe ont mené de nombreuses batailles afin de rendre leurs ventes au détail durables, à défaut d’être réussies. FashionUnited s’est faufilé sous le rideau pour découvrir ce qui se cache derrière la chute généralisée des ventes, dans le détail.
Afin de souligner les raisons de la maladie du secteur de l'habillement européen, FashionUnited Business Intelligence a analysé l'évolution de la vente au détail de textiles, d'habillement, de chaussures et de maroquinerie en magasins spécialisés, au cours des trois premiers trimestres de 2016 et a comparé ces données à celles de la même période de 2015.
Les détaillants en France, en Belgique et au Royaume-Uni, très touchés par les effets du terrorisme et Brexit
Même si le solde cumulé des ventes au détail dans les magasins spécialisés des 28 pays en conformité avec l'Union européenne, a légèrement fléchi (-0,2), les détaillants basés dans des pays comme la France, la Belgique et le Royaume-Uni ont été clairement touchés, souffrant de pertes plus importantes que leurs pairs opérant sur d'autres marchés européens.
FashionUnited Business Intelligence a examiné les causes possibles d'un tel recul, constatant que les taux de chômage en France, les séquelles des attentats terroristes en 2015 en France et en Belgique, et l'incertitude engendrée par la sortie imminente du Royaume-Uni de l'Union européenne, ont été les principaux facteurs qui ont affecté la croissance du chiffre d'affaires des détaillant de vêtements.
« Le terrorisme est toujours actif en Europe, les atrocités majeures ayant déjà eu lieu dans les centres commerciaux de luxe tels que Paris et la Côte d'Azur », a déclaré Fflur Roberts, responsable des produits de luxe à Euromonitor International.
ForwardKeys a expliqué l'année dernière que l'Europe était la seule région du monde à recevoir moins de réservations internationales, en 2016 qu'en 2015, avec une baisse de 2,1 pour cent par rapport à l'été précédent.
Le tableau montre le pourcentage de variation de la vente au détail de textiles, d'habillement, de chaussures et de maroquinerie en magasin spécialisé. Période analysée T1, T2, T3, 2016 vs. T1, t2, T3 15.
Les détaillants de luxe déplorent la baisse de touristes riches vers les capitales européennes
Les détaillants de luxe se sont distingués comme les principaux perdants, car le ralentissement global des ventes de luxe, au cours de la dernière année, a forcé plusieurs grandes marques à repenser leur stratégie. Pendant l’été 2016, Prada a signalé son premier déclin majeur dans les ventes du premier semestre, depuis 2011, en citant le terrorisme comme l'un des principaux coupables. Hermès et Louis Vuitton ont également fait état d'un affaiblissement des ventes, au cours de la même période.
« L'infrastructure européenne des transports et du tourisme a également été une cible clé pour les attentats et les attaques. Ces événements ont un impact immédiat sur le tourisme et par la suite sur les dépenses de luxe, avec des baisses courtes et nettes ressenties dans la foulée », a encore souligné Roberts.
Confirmant cette tendance, les données recueillies par FashionUnited montrent que la Belgique est le principal touché, les ventes au détail de vêtements, de chaussures, de textiles et de maroquinerie ayant perdu 5,5 pour cent, par rapport aux neuf premiers mois de 2016, en comparaison à la même période de l'année précédente. Les attentats terroristes perpétrés en mars à l'aéroport de Bruxelles et dans le métro, par l'Etat islamique, ont entraîné une perte de près de 1 million d'euros de recettes fiscales et commerciales pour le pays, que le tourisme n'a pas encore récupéré. Suite à ces attaques les réservations internationales en Belgique ont diminué de 23 pour cent, a déclaré Euromonitor.
Pendant ce temps, la France voisine a aussi souffert, étant également frappée par une série d'attaques terroristes à Paris, à Rouen et à Nice, qui ont provoqué une baisse de 11 pur cent des réservations internationales. En outre, le taux de chômage en flèche en France (+ 10,8 pour cent) a mis un coup aux consommateurs prudents, entraînant les ventes de détail de vêtements à la baisse de 4,3 pour cent, sur les neuf premiers mois de 2016.
Est-ce le Brexit ou devons-nous blâmer Amazon ?
Avec une baisse de 3,1 pour cent dans les ventes au détail pour la période analysée, le Royaume-Uni occupe la troisième place dans le groupe des perdants. Immédiatement après le vote du Brexit, l'incertitude politique a entraîné une forte baisse de la confiance des consommateurs et a donc affecté les ventes au détail. Même si de nombreuses marques britanniques - d'ASOS à Burberry - ont bénéficié d'une livre moins cher, ces gains n'ont pas été transmis aux acheteurs britanniques, qui se sont retrouvés avec un pouvoir d'achat moindre alors que la livre a été dévaluée.
Cependant, le Brexit pourrait ne pas être la seule raison. De nombreux analystes soulignent qu'il y a un changement croissant dans les préférences des acheteurs vers les achats en ligne, déclenché par une plus grande commodité et de meilleurs prix, défendu par l’omniprésence d’Amazon.
Les ventes globales de sites web en Europe ont atteint 455,30 milliards d'euros, en hausse de 13,3 pour cent, par rapport aux 401,85 milliards d'euros, selon E-commerce Europe. Le Royaume-Uni ouvre la voie avec 81 pour cent des individus achetant en ligne en 2015. En outre, entre 10 et 12 pour cent du total des ventes au détail dans le pays s’est fait en ligne, selon Forbes.
Le soi-disant « Effet Amazon » a vu le géant du commerce électronique grignoter des ventes d'articles d'habillement, de la maison et d'autres articles de base du grand magasin traditionnel.
Photo credit: Flickr, by Achim Hepp