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Devant la justice, les dénégations des grossistes chinois accusés de blanchiment

Par AFP

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Crédits: Unsplash

Paris - Ils sont tombés des nues, devant le tribunal correctionnel de Paris. Qu'ils aient pu cacher des espèces au fisc, ça d'accord. Mais qu'ils soient au coeur d'un vaste réseau de blanchiment d'argent issu du trafic de drogue, les membres de la communauté chinoise l'ont nié en bloc.

Depuis mardi, 21 personnes sont jugées dans cette affaire, qui date des années 2014-2015, de blanchiment en bande organisée et association de malfaiteurs. Elles sont accusées d'avoir mis en place un système complexe pour "laver" les recettes provenant d'un trafic de résine de cannabis importée du Maroc.

La "plaque tournante" des opérations, selon les enquêteurs: les grossistes en textile d'Aubervilliers, dont les sociétés d'import-export - essentiellement gérées par des ressortissants chinois - étaient réunies au sein du Centre international de commerce de gros France-Asie (Cifa), en Seine-Saint-Denis.

"Ce n'est qu'après ma mise en examen que j'ai appris l'existence de tout ce système", a déclaré incrédule Azhong Chen, 59 ans et gérant de la société Miss Linda.

Le système en question, la présidente Armelle Briand l'a ainsi résumé mardi en ouverture du procès, qui doit s'étirer jusqu'au 29 mars: le "vaste circuit de blanchiment d'argent, qui a pour pivot le Cifa d'Aubervilliers, est composé en amont de collecteurs d'argent et en aval de compensateurs qui récupèrent les espèces contre des virements bancaires".

Lors de la perquisition chez Miss Linda, les enquêteurs ont retrouvé 85.050 euros, sur lesquels des "traces" de cannabis ont été relevées.

Pourquoi cet argent liquide était-il emballé "avec la même méthode que le trafic de drogue", a interrogé jeudi la présidente Briand. L'aluminium, "c'était pour protéger l'argent des souris", mais sa provenance n'a rien d'illégal, a soutenu à la barre Azhong Chen, reconnaissant la "fraude fiscale" pratiquée par son entreprise.

Le principe mis au jour dans le dossier, à savoir des espèces diluées dans le flux du commerce légal et échangées - moyennant commission - contre des virements bancaires, le Chinois Ruo Lin, alias "Tony", l'a reconnu.

"Pour ma grand-mère"

Mais rien à voir avec le trafic de drogue, a insisté le gérant du commerce de demi-gros Azaka: "C'était pour les soins de ma grand-mère" qu'un virement de 12.000 euros a été envoyé sur un compte bancaire en Chine, compensé par des espèces, a assuré le patron de 39 ans.

Des explications qui, après trois jours d'auditions, ont exaspéré la présidente. La magistrate a déploré toute la semaine la "mauvaise foi" des prévenus, pour beaucoup originaires de la même ville de Zhejiang, et répété inlassablement, après chaque réponse: "Ce n'était pas ma question..."

Pour tenter de comprendre les liens présumés entre ces grossistes et les trafiquants de drogue, la justice attend beaucoup des auditions, le 13 mars, d'un couple de ressortissants chinois par lequel l'affaire a explosé en 2014: c'est à cette époque que la Brigade de recherches et d'investigations financières (Brif) de la police judiciaire parisienne avait identifié le réseau opérant sous le couvert de leur entreprise, Vetis.

Car jusque-là, magistrats et procureurs se sont heurtés à un mur de silence.

"Je ne comprends pas pourquoi nous sommes impliqués dans cette affaire. Nous n'avons jamais participé à ce genre d'activité", a par exemple déclaré mercredi Zhiyuan Chen, 38 ans, s'exprimant tantôt en français, tantôt par l'intermédiaire d'un interprète.

L'enquête a établi que sa société de l'époque, Deevee, a réceptionné plusieurs "colis" d'espèces. Lors de la perquisition, 98.000 euros sont retrouvés, portant là encore des traces de produits stupéfiants, tout comme les deux compteuses à billets de l'entreprise.

"Nous ignorons l'origine des espèces payées par les clients", répond Zhiyuan Chen, campé dans la même posture que tous les prévenus: jambes écartées, mains jointes reposant sur le ventre.

De son activité vieille d'une décennie, Zhiyuan Chen a presque tout oublié. Sauf un détail, sur l'argent retrouvé au magasin. Il s'agissait d'un "acompte" payé par une société allemande, dont il se souvient encore du nom: "Innocent".(AFP)

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