Contrat de licence : le conflit entre Dior et le fabricant de lunettes Safilo se dirige vers une médiation
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Dans un jugement rendu le 6 février 2024, la Cour d’Appel de Paris a proposé d’avoir recours à un médiateur pour mettre fin au conflit qui oppose Dior, propriété du groupe LVMH, et Safilo, fabricant de lunettes italien. Flash-back.
Dior, propriété du groupe LVMH, et Safilo, lunettier italien, sont entrées en relation à compter de 1996. Les lunettes Dior étant exclusivement commercialisées dans un réseau de distribution sélective mis en place par Safilo en vertu de plusieurs accords de licence successifs.
Par contrat de licence du 29 septembre 2010 se substituant aux précédents, la licence de marque sur les produits de lunetterie Dior a été directement consentie par Dior à Safilo jusqu'au 31 décembre 2017. Ce contrat, soumis au droit français et qui comporte une clause attributive de juridiction en faveur des juridictions du ressort de la Cour d'appel de Paris, a été modifié par un avenant du 9 décembre 2016, qui en a prorogé le terme au 31 décembre 2020.
Le 27 juin 2019, Dior confirme à Safilo que leur relation contractuelle prendra fin à ce terme, date au-delà de laquelle elle souhaite confier la fabrication de ses lunettes et la gestion de leur réseau de distribution à la société Thelios, créé avec un autre lunettier italien, Marcolin (dont le groupe a, depuis, racheté 100% des parts).
Dans ce contexte, Dior reproche à Safilo d'avoir commis des manquements à ses obligations contractuelles en refusant notamment de s'acquitter de factures, accumulant une dette d'un montant de 17 millions d'euros au mois de mai 2021. Elle reproche en outre à Safilo d'avoir cessé de lui transmettre des informations que le contrat de licence lui imposait de communiquer.
Par acte introductif d'instance du 22 octobre 2021, Dior assigne Safilo à comparaître à bref délai devant le tribunal de commerce de Paris afin qu'il ordonne à cette société de communiquer plusieurs séries d'informations et de documents relatifs à la distribution des lunettes commercialisées sous ses marques en vertu du contrat de licence et qu'il autorise la société KPMG, en tant qu'auditeur indépendant désigné par Dior, à réaliser un audit dans les locaux de Safilo.
Par jugement du 11 mai 2022, la Cour d’Appel de Paris déboute la société Safilo de sa demande de saisie de l'Autorité de la concurrence. Et ordonne à Safilo de communiquer à la société Christian Dior Couture, entre autres : les bases de données par référence et par point de vente, la liste et le détail des ventes par référence et par client, la copie des rapports d'audit sur les points de vente, la répartition des quantités et du chiffre d'affaires total net des retours par catégorie de produits et par pays, etc. Le tout sous-astreinte de pénalités de retard.
Dior demande à Safilo, avec qui la marque était sous contrat de licence pour ses lunettes, de lui fournir tous les documents inhérents à leur distribution
Pour la Cour d’Appel de Paris, il apparaît, en l'espèce, dans l'intérêt des parties comme dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, que le recours à la médiation judiciaire soit une issue possible, adaptée au règlement de leur litige.
Par courrier du 18 janvier 2024, la société Dior a donné son accord à une telle mesure, tout en souhaitant que celle-ci soit enserrée dans un délai de quatre à six semaines. Par courrier du 29 janvier 2024, la société Safilo a également donné son accord à une mesure de médiation, sous la réserve d'un délai plus long de six à huit semaines.
En conséquence, la Cour d’Appel de Paris ordonne une mesure de médiation judiciaire et fixe à cinq mille euros le montant de la provision à valoir sur sa rémunération, répartie entre les deux sociétés. À l’issue de la médiation, l'instance reprendra, sans nouvelle audience, pour statuer sur le litige en tenant compte des suites éventuelles de la médiation.